J’ai quitté la fac. Avec l’argent économisé, je me suis acheté une voiture.
Et puis la terreur et la jalousie se sont emparées de moi. J’ai fait une erreur.
Je voyais tout le monde déambuler sur le campus. Allais-je devenir un « loser » ?
J’ai rendu la voiture, annulé le chèque et je me suis réinscrit à la fac.
Voilà à quel point je suis un loser : le concessionnaire, en colère, m’a appelé. Je me suis planqué sous la table pendant que ma petite-amie du moment lui criait dessus. Il n’a jamais rappelé.
Un jour plus tard, j’ai rencontré mon premier mentor.
Il était professeur. Ses cours ne servaient à rien. Je ne m’en suis jamais servi pour quoi que ce soit.
Et ensuite, j’ai dû prendre des cours de rattrapage en programmation, quand j’ai décroché un emploi, pour réapprendre toutes les choses que je n’avais pas apprises à l’école.
Mais ce professeur m’a inculqué des choses inestimables, pour ma réussite future : créer une entreprise, aider les autres, écrire des livres, laisser un impact.
J’ai suivi ses conseils au cours des trente années suivantes.
Ou du moins ai-je essayé.
1) Il s’est choisi
Il a décroché un PhD en physique théorique. Alors qu’il travaillait sur sa thèse, Stephen Hawking lui a dit la chose suivante : « Si vous résolvez ce problème, cela changera la donne dans le domaine de la physique. »
Il a résolu le problème.
Alors Stephen Hawking lui a dit : « Hum, j’imagine que c’était moins important que je ne l’avais pensé. »
—
Déçu, il a quitté l’Utah pour s’installer à New York, et il a nourri une obsession pour l’informatique.
Il voulait être professeur mais l’université a dit « NON ! ».
Alors il l’a quand même fait.
Il a tout simplement déniché une salle de classe toujours vide en début de soirée et placardé des affiches indiquant : « Cours de langage de programmation ».
Au début, quelques personnes sont venues. Et puis d’autres. Et d’autres encore.
Au bout du compte, tellement d’étudiants assistaient à ses cours que l’université l’a intégré comme professeur.
Plus tard, il a été titularisé. Et ensuite, il a obtenu une chaire de professeur dans un autre établissement où il enseigne toujours.
Il n’a pas laissé les « sentinelles » lui dire « non », et il a fini par exercer le métier de ses rêves.
Leçon clé : Demandez pardon mais pas la permission, si vous avez bon cœur. (Rendez-vous à la rubrique Choisissez-vous)
2) Il a évalué sa réussite par rapport à celle des gens qui l’entouraient
Ce n’est pas un professeur réputé. Il n’a jamais publié d’articles révolutionnaires. Mais tous ses étudiants sont devenus de brillants professeurs.
Voici ce qu’il m’a dit, précisément : « J’aurai réussi si mes étudiants réussissent. »
Il leur a toujours reconnu le mérite de tout ce qu’ils faisaient et les a aidés à tous les stades de leur carrière.
Leçon clé : La réussite se mesure à l’aide que vous apportez aux autres, et rien d’autre.
3) Il m’a appris à parler
J’étais très timide. Je n’arrivais pas à prendre la parole. J’avais peur de prononcer des discours. Et d’ailleurs, cela me fait toujours peur.
Mais…
Voici l’une des choses les plus inutiles que j’aie pu faire : écrire un article de recherche universitaire.
Mon professeur et moi avons travaillé sur un projet, rédigé les résultats, puis la plus prestigieuse des conférences consacrées à l’intelligence artificielle nous a acceptés.
Alors nous nous sommes envolés pour Kaiserslautern, en Allemagne, et conformément à son habitude, il allait me laisser faire la présentation et m’en attribuer tout le mérite.
MAIS…
Il m’a dit : « Ne va pas au dîner de la conférence. Cela ne sert à rien et tu ne rencontreras personne d’intéressant. »
À la place, nous sommes allés dans la salle de conférence déserte, où j’ai été terrorisé à l’idée du discours que je devrais prononcer le jour suivant.
Terrorisé.
Il a dit : « Voyons tes diapositives. »
Je les lui ai montrées et il a dit : « Non. Non. NON ! Non. Non. » Il les a toutes barrées, a fait des modifications, m’a montré pourquoi, et comment capter l’attention d’un public avec des diapositives.
Ensuite, il a dit : « Bien, fais ton discours devant moi. »
Il était seul, dans cet auditorium pouvant contenir 1 000 personnes, et pendant trois heures, il m’a regardé répéter encore et encore le même discours.
Il m’interrompait constamment, me disait comment bouger sur scène, à quel moment placer une plaisanterie, comment maintenir le climat émotionnel au niveau le plus élevé possible, tout en parlant d’un sujet incroyablement ennuyeux.
Au cours de la présentation, j’ai fait rire les gens. Certains sont même venus me voir, après, et m’ont dit : « Je n’avais jamais compris ce sujet, auparavant. Pourriez-vous donner la même conférence dans notre université ? »
Ce qui en dit long sur le thème de la conférence, et de l’article intitulé « Automatically Proving the Adjoint-Functor Theorem in Category Theory » [NDR : Démontrer automatiquement le théorème de foncteur adjoint en théorie des catégories].
Tout à fait inutile !
Leçon clé : Les gens se souviennent de vous en fonction de la façon où vous communiquez.
4) Il a toujours attribué le mérite à tous les autres
Il ne s’est jamais attribué de mérite. Il l’attribuait à ses étudiants, à ses supérieurs, à tous les autres.
J’ai appris à toujours attribuer le mérite aux gens qui travaillent pour moi et, plus important encore, aux managers, actionnaires, clients : à toutes les personnes possibles.
Les gens se souviennent, lorsque vous leur attribuez du mérite, et ne se souviennent pas, lorsque vous vous attribuez tout le mérite.
Et devinez quoi : d’autres personnes s’en aperçoivent, lorsque vous attribuez le mérite aux autres. C’est doublement gagnant.
Nous avons marché dans les rues de Kaiserslautern, en retournant à nos hôtels respectifs, après la répétition de mon discours.
Avant que nos chemins ne se séparent, il m’a donné un ultime conseil : « Ne mets jamais les pieds dans un sex-shop, en Allemagne. Ils vont te plumer. »
C’est la toute dernière fois que je l’ai vu. Un an plus tard, j’ai été viré de l’université.
Mais j’ai retenu les leçons et je les ai utilisées en tant que salarié, entrepreneur, investisseur, et en tant qu’individu ayant rebondi sans cesse après avoir essuyé les pires échecs.
- Attribuer le mérite aux autres.
- Toujours améliorer votre façon de communiquer.
- Demander pardon, et non la permission.
- Lorsque vous êtes découragé, la meilleure façon d’avancer est d’aider les autres.
- J’ai eu de nombreux mentors, depuis. Malheureusement, aucun d’eux ne m’adresse encore la parole.
- La vie fait suivre à chacun des parcours étonnants qui ne se rejoignent qu’un bref moment.
Dans ma vie, tout le monde est devenu mon mentor. Tout le monde : mes amis, mes enfants, mes auteurs préférés, les invités de mon podcast, mes collègues, Jasmine Lobe, et tous ces gens qui m’ont entraîné vers le bas ou élevé plus haut.
J’espère que je suis suffisamment à l’écoute. J’espère que j’apprends à leur côté. Je suis un perpétuel « apprenant ».
Mais je me souviens toujours avoir marché en Allemagne, à l’âge de 21 ans, ébloui par mon discours, l’avenir se précipitant vers moi, sans rien pour l’arrêter.
Bien plus tard seulement, je me suis rendu compte qu’un grand nombre de leçons pénibles me guettait et que l’avenir était arrivé bien plus vite que je ne le souhaitais.