Nous vous l’expliquions hier, l’Etat s’est mis à taxer les plus-values des contrats multi-supports… en cours de vie ! Quand bien même ces gains en Euros puissent au gré d’un arbitrage ultérieur malheureux être entièrement consumés par un marché boursier adverse !
Or un contribuable a contesté les prélèvements sociaux (PS) sur les gains latents. Et il est en bonne voie d’obtenir gain de cause.
En cas de jurisprudence, l’Etat pourrait être obligé de modifier la taxation des gains de votre assurance-vie en votre faveur.
Faisons le point ensemble :
L’arrêt Camus : le grain de sable ?
Mais voilà qu’un contribuable a contesté les prélèvements sociaux (PS) sur les gains latents. Muni de son bâton de pèlerin, ce dernier a saisi le Tribunal administratif (TA) de Cergy-Pontoise et posé une question prioritaire de constitutionnalité (QPC). En clair, il doute fortement que le texte prévoyant ces PS dans ce contexte précis d’investissement encore en phase de maturation soit conforme à la loi fondamentale de notre Cinquième République. Par un jugement favorable à l’assujetti, en date du 30 avril 2015, le Tribunal administratif valoisien dans son rôle de premier filtre des QPC a décidé de transmettre la controverse au Conseil d’Etat (n°1500243 et 1501646).
A son tour saisie, la juridiction du Palais-Royal a été convaincue que la question posée était inédite et sérieuse dans son fondement. Ainsi, la Haute juridiction (Conseil d’Etat, 17 Juin 2015, n°390001 opérant le second et ultime filtrage des QPC a décidé de transmettre l’affaire au Conseil constitutionnel. Les Sages de la rue de Montpensier auront donc la mission de dire si oui ou non le dispositif voté fin 2011 est conforme à la Constitution.
Pour parvenir à cette conclusion, ils devront juger de la pertinence des arguments développés par le contribuable en colère qui réclame la restitution de la CSG, de la CRDS et des autres prélèvements sociaux additionnels sur les produits engrangés sur son contrat en 2011, 2012 et 2013.
Selon l’assujetti, ces prélèvements annuels sur les contrats multi-supports « méconnaissent les principes d’égalité devant la loi fiscale et d’égalité devant les charges publiques garantis par les articles 6 et 13 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, dans la mesure où les revenus assujettis à l’impôt sur leur fondement ne sont pas définitivement acquis pour le contribuable à la date de leur taxation ».
Une formulation lapidaire mais rigoureusement exacte de la part du contribuable !
En effet, on l’a vu : ces gains momentanés sont susceptibles d’être ré-allotis sur d’autres supports ; et si l’opération d’arbitrage n’est pas opportune, il y aura alors in fine transformation du gain transitoire en une moins-value consolidée et définitive ! Or un impôt « par anticipation » aura déjà été payé… tandis que le contrat par la suite dégage des pertes dont rien ne dit qu’elles puissent être remontées.
De là, il s’avère que la loi fiscale actuelle porte bien atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution, et plus spécialement à l’exigence de prise en compte des facultés contributives des citoyens au nom du principe intangible d’égalité devant les charges publiques, en ce que l’on aura fait payer les prélèvements sociaux sur des gains virtuels, voire en situation de pertes financières durant un laps de temps pouvant s’avérer très long. N’oublions pas que les contrats sont le plus souvent stipulés à vie entière.
L’épargnant aura été spolié d’une part non négligeable de ses capitaux
Or même si au bout de 20 ans, au dénouement intervenant soit en vie soit au décès, on se rend compte du trop-perçu et que le Trésor public restitue tout ou partie des prélèvements sociaux, il est clair que durant cet intermède l’épargnant aura été spolié d’une part non négligeable de ses capitaux !
En outre, il faut à mon sens souligner le facteur temps : aux Euros courants il faut opposer la charge en Euros constants qui s’avère encore plus lourde que le montant nominal écrêté sur les contrats…
Enfin, il est évident qu’il y a une rupture d’égalité. Car selon la classe d’actifs détenue par un citoyen :
- l’un paye un impôt sur les plus-values latentes de capitaux en Euros susceptibles d’être réorientés à tout moment en supports investis en Bourse. Gains toujours incertains jusqu’à leur réalisation ultime. Ne disait-on pas autrefois au Palais-Brongniart, au bon vieux temps de la criée autour de la corbeille et du compte-rendu quotidien à la fin du journal de 13 heures sur TF1 de René Tendron « qu’il vaut mieux tenir un chèque plutôt que la Côte Desfossés » ?
- et l’autre qui a tout placé en immobilier ne doit pas acquitter une fois l’an un impôt sur la plus-value théorique du marché catégoriel où est situé son bien ! Il paye de façon classique l’impôt sur les plus-values immobilières lorsqu’il cède définitivement son bâtiment. C’est-à-dire seulement au moment où le notaire liquide l’éventuelle plus-value et où l’on peut vraiment dire si on a réellement gagné de l’argent tous comptes faits, après déduction des gros travaux, etc.
Et après ? Que va-t-il se passer ?
Si le Conseil constitutionnel accueille favorablement la question prioritaire de constitutionnalité (QPC), alors il déclarera non conforme à la Constitution l’article 22 de la loi de finances pour 2011. Ainsi invalidé, l’Etat devra alors cesser de compter les prélèvements sociaux sur les contrats multi-supports ce qui ouvrira un droit à réclamation pour les prélèvements déjà opérés.
L’Etat devra donc dès lors attendre le dénouement du contrat par rachat ou décès pour constater les gains réels et les taxer.
Mais l’enjeu est plus important qu’il n’y parait. Si en termes purement fiscaux, en cas de gain, payer maintenant ou dans 20 ans revient au même, en revanche, en termes financiers, ce serait une manne supplémentaire correspondant à ces 15,5% qui amputent désormais des rendements de fonds Euros déjà faiblards ! Ainsi, remis à disposition au sein de l’enveloppe fiscale que constitue l’assurance-vie, cela permettrait à l’assuré de disposer de plus de capitaux pour arbitrer et réorienter son épargne en cours de vie du contrat vers des supports risqués et peut-être faire des gains encore plus importants… D’ailleurs, si l’Etat n’était pas obnubilé par la nécessité de boucler les fins de mois, il se serait rendu compte qu’à long terme il avait tout à gagner à ne taxer l’assujetti qu’à la fin du contrat…
Pour les « expats » peu d’incidence, du moins pour l’instant…
Toutefois, en matière de mobilité internationale, que cette QPC arrive ou pas à bon port, elle ne changera pas grand-chose ! En effet, le cas peut se présenter si le souscripteur d’un contrat multi-supports n’a pas encore ou bien n’a plus son domicile fiscal en France.
Pour les impatriés, l’assujettissement annuel aux prélèvements sociaux ne commence qu’à compter de la date du transfert de la résidence fiscale en France.
A l’inverse et sans doute le cas le plus courant, en cas d’exil fiscal notamment vers l’un des pays étudiés dans notre rapport Retraite Dorée, il suffit une fois domicilié fiscalement à l’étranger de notifier ce déménagement à l’assureur-vie qui cesse immédiatement d’opérer ces prélèvements annuels pour le compte du Trésor.
Au dénouement, les prélèvements sociaux sont appliqués comme lors d’un rachat taxable en France… du moins aussi longtemps que ces cotisations sociales appliquées aux non-résidents ne seront pas considérées comme illégales au regard du Droit européen. Mais ça c’est une autre question qui n’a pour l’instant pas trouvé de réponse définitive, comme je l’écrivais dans mon article du 24 mars 2015 !
Ces quelques lignes ne sont qu’un aperçu du vaste sujet qu’est l’assurance-vie, sa taxation et sa transmission.
Si vous souhaitez optimiser la transmission de votre patrimoine il y a encore bien d’autres choses que vous devriez connaître dans ce domaine.
Vous n’avez certainement pas envie que ce soit le fisc qui se taille la part du lion au cas où il vous arriverait quelque chose ? Ou de voir vos dispositions mises à mal par vos héritiers qui se déchireraient ?
En réalité, il y a deux écueils susceptibles de couler votre stratégie patrimoniale :
- L’écueil juridique des primes dites exagérées. Qu’est-ce qui est « exagéré » et par rapport à quoi ?
- L’écueil fiscal de la requalification en libéralité, c’est à dire en donation déguisée ou indirecte.
Ultra-concret, notre rapport spécial fait un tour complet de ces questions en 61 pages et vous donne toutes les armes pour contourner ces deux écueils. Il ne s’agit pas de montages juridiques fumeux mais de bien exploiter le Code civil, le Code des impôts et le Code des assurances, dans VOTRE intérêt. Et surtout de s’assurer que tout est bien verrouillé… qu’aucune place n’est laissée à l’incertitude, l’insuffisante préparation, ou pire la mauvaise surprise de dernière minute.
Pour en savoir plus : cliquez ici
L’assurance-vie c’est bien, mais assurer la bonne transmission – et dans les meilleures conditions – de votre contrat, c’est encore mieux.
N’attendez pas pour découvrir ce document qui vous révèlera tout ce que votre conseiller financier ne vous dira jamais : il suffit de suivre ce lien pour passer votre commande…
______________
BIO Fabrice Coletto pour site Libre d’Agir
Consultant en fiscalité des personnes en toute indépendance, Fabrice Coletto-Labatte n’est affilié à aucun groupe de commercialisation de produits financiers et ne fournit que du conseil. Responsable du Diplôme d’université de 3e cycle « Investissements immobiliers » de l’université Toulouse 1 Capitole, il édite également des guides fiscaux thématiques (taxetube.fr).
Son expérience professionnelle passée dans l’univers des sociétés d’économie mixte lui a fait exercer des activités de management ainsi que des missions d’économiste au sein d’un observatoire de l’habitat où il était en charge d’études immobilières.