Je n’ai rien écrit pendant 24 heures.
À présent, je me sens mal. C’est comme si mon cerveau était vide, comme s’il avait décidé qu’il n’écrira plus jamais. Je me sens nul. Depuis trente ans, je ne souhaite qu’une chose : écrire tous les jours. Maintenant, c’est terminé.
Je ne peux même pas m’occuper de mes enfants tant que je n’ai pas écrit.
Durant ces vingt dernières années, pas un seul jour ne s’est passé sans que j’aie écrit. J’ai à mon actif 22 livres et des milliers d’articles.
Avec toujours cette peur que le flux ne se tarisse. Ce qui est souvent le cas.
Mais c’est dans ces moments-là qu’il faut être pro. Les idées doivent affluer à nouveau.
1) CAFÉ
Je le dis en toute honnêteté. Qui sait si le café est bon ou mauvais pour la santé ? Néanmoins, je commence à écrire à partir de ma troisième tasse de café de la journée.
Je ne sais pas pourquoi cela fonctionne. Mais le café permet à mon cerveau de se mettre en route.
2) LIRE
Je lis toujours avant d’écrire. J’ai tendance à lire du réalisme sale [NDR : mouvement littéraire américain né dans les années 1970-1980, caractérisé par une description sans fioritures d’aspects quelconques ou sordides de la vie quotidienne]. Des nouvelles ou des essais autobiographiques, qui sont pour la plupart du temps authentiques et écrits par des écrivains de qualité.
Chacun a sa propre liste d’écrivains préférés. Pour ma part, j’aime bien Raymond Carver, Miranda July, Denis Johnson, Cheryl Strayed, Bukowski, James Frey, etc.
Lorsque je les lis, c’est comme si j’entrais dans leur processus de pensée et cela me pousse à écrire ma propre histoire de réalisme sale à partir de ma vie.
Je peux me laisser porter par la voix de l’écrivain et laisser les idées venir à moi.
Souvent, je ne peux commencer à écrire sans avoir lu d’abord. Lire m’a donné des centaines et des centaines d’idées de sujets sur lesquels écrire ET de manières d’écrire.
Un exemple ? L’autre jour, je lisais le roman de Tim O’Brien, À propos de courage, qui parle des fardeaux physiques, émotionnels et mentaux que ses camarades soldats et lui ont transporté dans la jungle au Vietnam.
Cela m’a fait penser à ce que l’on ressent lors de la création d’une entreprise. Tout la pression émotionnelle qui l’accompagne. La peur ou la honte de l’échec. Les inquiétudes pour sa famille. La peur des clients. Les inquiétudes liées à l’argent.
J’ai donc écrit sur les angoisses que je porte au cours de ma journée. Ai-je copié Tim ? Oui. Mais les prémisses font partie du jeu.
3) MÊME HEURE CHAQUE JOUR
Si je me lève à 4h30, j’ai fini de lire et de boire mon café à 6h, heure à laquelle je m’installe devant mon écran pour essayer d’écrire. Notre cerveau est notre esclave, pas notre maître.
Je ne pense pas qu’il faille absolument avoir le même horaire chaque jour ; parfois je varie. Néanmoins, cela aide.
4) COMMENCER PAR LE MILIEU
C’est la technique n°1 pour commencer quelque chose.
Admettons que j’écrive sur le mariage. Devrais-je commencer par la première fois où j’ai rencontré ma première femme ? Devrais-je commencer par mon tout premier rendez-vous ? Devrais-je commencer par la première fois où j’ai envisagé de me marier ?
Je ne sais pas. Trop de choix.
J’ai donc commencé par le milieu : « Et puis j’ai divorcé. »
Le lecteur est déstabilisé. C’est un risque que prend l’auteur (les risques, bien pris, donnent envie au lecteur d’avancer).
C’est un peu comme si le lecteur se retrouvait invité au beau milieu d’une conversation privée. Qu’arrivera-t-il ensuite ? Pourquoi a-t-il divorcé ?
À partir de là, les quelques lignes et paragraphes suivants sont généralement simples. En gros, j’essaie de me sortir du trou que j’ai moi-même créé dans cette première phrase.
5) COMMENCEZ PAR DU SANG
S’il n’y a pas de sang dès le départ, on n’accroche pas.
L’autre jour, j’écrivais à propos de mon tout premier client lorsque j’étais entrepreneur.
La première phrase de mon article était celle-ci :
« Si tu répètes cette conversation, je te tuerai », me dit Shlomo.
Si je suis un bon écrivain, cette phrase devrait conduire le lecteur à se demander : quelle est cette conversation ? Cette personne est-elle vraiment sérieuse ?
Les phrases suivantes, voire même peut-être toute l’histoire, découleront de cette première phrase.
Une autre fois, j’écrivais sur le fait que je consultais un thérapeute alors que je souffrais constamment de crises d’anxiété à propos de l’argent.
Première phrase :
« La seule chose qui puisse m’aider est de me libeller un chèque d’un million de dollars tout de suite », dis-je au psychiatre lors de ma première séance avec lui.
6) NE PARLEZ JAMAIS DE CE QUE VOUS ALLEZ ÉCRIRE
Lorsqu’un récit est encore en vous, c’est comme un bébé qui se développe à l’intérieur du ventre de sa mère.
Le bébé se nourrit de votre vitalité, de votre cerveau, de votre force émotionnelle et il se développe au fil du temps. En parler, c’est en avoir accouché.
L’énergie des mots se disperse dans l’air, ils ne laissent aucune trace et disparaissent.
N’accouchez pas prématurément.
Donnez naissance par l’écriture d’abord. Ce n’est qu’après que vous pourrez en parler.
7) INSPIRATION
Parfois, j’ai le syndrome de la page blanche. J’ai lu, j’ai bu mon café, j’ai analysé mes grands échecs passés, etc. Et pourtant je n’arrive pas à trouver quoi écrire.
Dans ce cas, voici ce que je fais pour trouver l’inspiration :
- Je regarde la pièce où je me situe.
- Je surfe sur des sites web qui postent toujours des photos étranges (Boing Boing, Brain Pickings, The Browser, etc.). Par exemple, « Six enseignements insolites inspirés de Louis Armstrong » est né du premier site de la liste ci-dessus.
- Je me penche sur mes propres écrits. Je relis les histoires que j’ai écrites et analyse s’il y a moyen de les détailler encore plus.
- Je repense aux choses les plus embarrassantes. Un jour que j’avais le syndrome de la page blanche j’ai sélectionné les choses les plus embarrassantes qui m’étaient arrivées et j’en ai fait un article intitulé, à juste titre, « L’angoisse de la page blanche ».
8) DEVENEZ LE MÉCHANT
Si j’écris sur la période où j’ai été passionnément amoureux d’une femme, je peux commencer par : « J’ai rompu avec elle par SMS. »
Ou si vous écrivez sur la manière de gagner de l’argent, vous pouvez commencer ainsi : « La pire chose que je n’aie jamais faite a été de voler de l’argent à mes parents. »
[Lire aussi : Êtes-vous un entrepreneur aux mains sales ?]
Personne ne veut lire l’histoire d’une star de cinéma et de sa vie parfaite en tout point. Les gens veulent voir des défauts. Soyez honnête et transparent.
Si les lecteurs ne peuvent pas se projeter, alors ils ne vous liront pas.
9) VÉRIFIEZ QUE VOUS ÊTES HONNÊTE
Assurez-vous que vous n’essayez pas de vous protéger. Protéger les autres est important. Ne faites pas de mal.
Mais si vous voulez raconter une histoire, vous n’avez pas à être le héros d’un article de blog.
Un exemple ? L’un de mes premiers articles les plus populaires était intitulé « Comment j’ai escroqué Yasser Arafat de 2 millions de dollars« . De but en blanc, j’ai déclaré avoir besoin de 100 millions de dollars. Personne n’a besoin de 100 millions de dollars.
Puis j’ai décrit ce que je ferais avec 100 millions, tout ce que j’ai fait pour essayer de les avoir et enfin ce que Yasser Arafat avait à voir dans l’histoire.
L’histoire se comprenait d’elle-même. Mais j’étais arrogant, stupide, méchant et – du moins à cette époque – je n’avais aucune idée de ce que je faisais.
Si j’avais essayé de me protéger, alors il n’y aurait pas eu d’histoire. Par conséquent, vérifiez toujours que vous êtes bien honnête. Est-ce que vous dites quelque chose parce que c’est vrai ou parce que vous essayez de vous protéger ?
10) RÉSOLVEZ UN PROBLÈME
Si j’ai un problème comme « Je suis en colère« , alors je peux m’attaquer aux questions suivantes.
- À propos de quoi suis-je en colère ?
- Pourquoi suis-je en colère ?
- Comment je gère cette colère ? ET en bonus…
- Pourquoi suis-je en colère à propos de cela en ce moment même ?
Deux de mes filles se sont inscrites à l’université.
Cela m’a rappelé tous les problèmes que j’ai connus à la fac. Cela m’a fait penser à tous les problèmes que je vois chez des gens que je connais qui ne trouvent pas de travail (malgré un diplôme universitaire) et qui luttent pour rembourser leur dette étudiante.
Cela m’a fait penser aux gros salaires que les présidents d’université touchent. Cela m’a fait penser au fait qu’en classe, on ne vous enseigne que des compétences scolaires. Vous n’apprenez les compétences du monde réel que dans le monde réel.
Puis j’ai reçu une lettre de l’université dans laquelle se trouve une de mes filles. Cette lettre m’a mis en colère. L’université me réclamait 16,92 dollars à cause d’un micro-ondes cassé dans la résidence universitaire de ma fille et tout le monde se partageait les frais de manière équitable.
Ce qui m’a rappelé que la veille, cette même université avait lancé un appel aux dons.
Pas besoin d’en faire une grosse affaire.
L’autre jour, je regardais une vidéo où un groupe d’investisseurs discutaient des « cinq meilleurs investisseurs de l’histoire ».
Mais ils se trompaient sur tout : sur les faits, sur l’histoire, sur les biographies. Je me suis dit que s’ils se proclamaient « experts », ils auraient dû en savoir plus.
J’ai donc écrit ma propre version.
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Les 10 techniques listées ici sont pratiquement à l’origine de tous les articles que j’ai écrits durant ma vie.
J’ai sans doute le syndrome de la page blanche chaque jour. Et honnêtement, cela me rend malade.
Mes enfants savent qu’il ne faut pas m’approcher lorsque je suis bloqué devant ma page blanche.
Heureusement, aujourd’hui, j’ai écrit.