Une fois, je me suis rendu à une assemblée générale des actionnaires de Berkshire Hathaway. J’y ai rencontré un type qui m’a raconté comment, en 1976, il avait acheté 200 actions Berkshire.
« Après un an, le titre avait doublé – j’ai donc décidé de prendre quelques profits. J’ai vendu 100 actions et j’ai lancé un restaurant, que j’ai géré pendant les 30 années suivantes, m’a-t-il dit. Je gagnais correctement ma vie. »
« Avec les 100 autres actions, je n’ai rien fait du tout. Elles valent désormais plus de 12 millions de dollars. »
J’admets. J’étais jaloux. Je voulais être à sa place.
Après cet épisode, j’ai pu me procurer les lettres de Warren Buffett. Pas ses lettres à Berkshire, qui sont disponibles au public. Celles de son hedge fund qui, à l’époque, étaient privées. Elles sont peut-être désormais publiques. Je ne sais pas du tout.
J’ai étudié chacune d’entre elles. Ensuite j’ai écrit un livre, Trade Like Warren Buffett [« Tradez comme Warren Buffett », N.D.L.R.] parce que quand il gérait son hedge fund dans les années 50 et 60, il avait une stratégie bien plus active que maintenant. Bien plus agile.
Warren Buffett ne regarde pas les PER. Il n’est pas un investisseur par la valeur au sens classique du terme. Il parie sur les tendances démographiques. Sa citation la plus importante en matière d’investissement est la suivante : « Si dans 20 ans, une entreprise est toujours là, c’est que c’est probablement un bon investissement actuellement. » Ce n’est pas toujours vrai. Il a bien dit « probablement ».
Quelles entreprises seront probablement encore là dans 20 ans ? Je n’en ai pas la moindre idée. Lui non plus. Mais je miserais sur les entreprises qui rapportent du cash à leurs actionnaires.
Comme me l’a dit Mark Cuban l’autre jour, « une entreprise ne vaut que l’argent qu’elle vous rapporte ».
(Buffett vit encore dans cette maison. J’ai demandé au chauffeur de taxi de passer devant.)
Alors voyons les participations historiques que Warren Buffett (ou son équipe) a ajoutées ou soldées dans le portefeuille de Berkshire Hathaway ces derniers temps.
AAPL (Apple)
Cela a surpris pas mal de monde. Buffett dit depuis longtemps qu’il n’aime pas investir dans les entreprises technologiques parce qu’il ne sélectionne que les secteurs qu’il comprend – « j’en sais à peu près autant sur les semi-conducteurs ou les circuits intégrés que sur les habitudes de reproduction du chrząszcz », a-t-il écrit un jour.
Mais les gestionnaires de Berkshire Hathaway ont passé outre les instructions du patron et ont acheté 9,8 millions d’actions Apple début 2016, tirant parti du cours extrêmement déprimé de la valeur.
En mai 2018, Buffett a encore renforcé sa position sur la firme à la pomme, ce qui porte à 75 millions le nombre d’actions supplémentaires acquises au cours des premiers mois de l’année. Actuellement, Berkshire Hathaway détient 240,3 millions d’actions pour une valeur de 42,5 milliards de dollars (35,53 milliards d’euros). Cela en fait le deuxième actionnaire d’Apple.
Une entreprise assise sur une telle trésorerie et Buffett parmi ses investisseurs ? Oui merci.
PG (Procter & Gamble)
En 2014 encore, PG figurait parmi les positions les plus importantes de Buffett avec une valeur de plus de quatre milliards de dollars, représentant environ 2% des actions de l’entreprise en cours. Mais c’est terminé. En 2016, Berkshire a réduit son exposition à Procter & Gamble de 99%, à 25 millions de dollars seulement, en vendant plus de 52 millions d’actions.
IBM (IBM)
Le cours d’IBM continuait de chuter, et Buffett continuait de moyenner à la baisse sa base de coûts. Il avait ajouté environ 200 000 actions en 2016 ce qui portait sa position totale – sur un titre dont le rendement était à près de 3,8% – à 81,2 millions d’actions. Fin 2017, Berkshire ne détenait plus que 2 millions d’actions du géant des services informatiques. En février 2018, il a vendu l’essentiel de sa participation.
Voilà pour l’idée générale.
Ma règle de base est la suivante : toujours investir comme les gens plus intelligents que moi. Warren Buffett est plus intelligent que moi.
Une anecdote durant l’assemblée : quelqu’un a demandé à Charlie Munger et Warren Buffett ce qui allait advenir du dollar US.
Munger, qui avait à peine ouvert la bouche depuis le début de l’assemblée, déclara : « Vous feriez mieux de commencer à enterrer tous vos biens les plus précieux dans votre jar… – »
C’est là que Buffett l’a interrompu d’un sévère « Charlie ! ».
Je ne sais pas ce qui va arriver au dollar. Ou à toutes ces actions. Ou à ma relation avec ma femme. Ou à ma relation avec mes enfants. Un jour, un docteur m’a dit que nous avons tous des cellules cancéreuses ; simplement nous ne les voyons pas tout le temps.
Ma foi, tout cela est bon à savoir. Mais je pense vraiment que Buffett en sait plus long que moi. Si je filtre ses connaissances avec le fait évident qu’il est plutôt bon signe que des entreprises me versent du cash tous les jours, et si je filtre ça avec les tendances démographiques, et si j’ajoute le filtre supplémentaire que les dividendes versés par ces entreprises augmentent depuis des années, et si en plus de tout ça je me dis, « suis-je diversifié ? », alors je sais que je construirai un portefeuille correct.
Et si en plus Warren Buffett sélectionne toutes les actions pour moi, gratuitement (c’est mon stagiaire bénévole, après tout), alors c’est un bon début.
[Dans Les Microcaps d’Altucher, je sélectionne pour vous les meilleures valeurs grâce à mon expérience d’investisseur et de gérant de hedge fund et à mon réseau de grands investisseurs comme Warren Buffett. Pour en savoir plus…]