Je déteste avoir peur. Je déteste être anxieux. Or nous traversons aujourd’hui une crise digne de celles de 2001 et de 2008… additionnées et multipliées par 10.
Dans ces deux cas, je me suis effondré. Émotionnellement, financièrement, du point de vue de la famille, de la santé… Sur tous les plans. J’ai voulu apprendre de mes erreurs, et c’est ce que j’ai tenté de faire. Touchons du bois : bien que stressé, je survis, et j’espère qu’il en va de même pour beaucoup de gens.
Posons maintenant quelques GRANDES questions que l’on entend souvent : pourquoi le marché est-il déconnecté de l’économie ? Allons-nous assister à une hyperinflation ? Et surtout, surtout… QU’EST-CE QUE JE SUIS CENSÉ FAIRE ?
POURQUOI LA BOURSE EST-ELLE DÉCONNECTÉE DE L’ÉCONOMIE ?
Pour commencer, parlons un peu des nouvelles de cette semaine : « L’économie a enregistré un recul de 32,9% au deuxième trimestre. » Les médias ont fait semblant d’être choqués… et comme souvent, il ne faut pas croire à tout ce théâtre.
Voici quelques réflexions à ce sujet :
- Tout le monde le savait déjà. Le deuxième trimestre a été une catastrophe absolue. Des dizaines de millions d’entreprises avaient fermé leurs portes : tout le monde était conscient que la santé de l’économie était plus mauvaise que jamais.
- Les gros titres annonçaient « une baisse de 32,9% » mais oubliaient de mentionner qu’il s’agit d’un chiffre annualisé. Sur le trimestre, la baisse est d’environ 9%.
- Une baisse de 9% correspond à un montant d’environ 500 milliards de dollars US. Devinez quoi ? Les versements directs visant à provoquer une reprise ont été de 500 milliards de dollars exactement. Ce n’est pas une coïncidence : le plan de relance était conçu pour remplacer l’argent perdu par l’économie.
Ces nouvelles m’ont donc donné l’impression de lire le journal d’il y a trois mois. Mieux vaut les laisser de côté.
MAIS…
Au total, 55 millions de personnes se sont inscrites au chômage. Des dizaines de millions d’entreprises ont déjà dû mettre la clé sous la porte. L’économie est au plus bas… Alors pourquoi la Bourse est-elle au plus haut ?
Est-elle à ce point déconnectée de l’économie ?
Bien sûr que oui !
Il y a une corrélation à très long terme entre le marché et l’économie… mais jamais à court terme. Pourquoi ?
Il y a plusieurs théories – elles fonctionnent toutes – mais la dernière théorie que je vous présenterai est la « plus correcte ».
Lire la suite…
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Théorie 1 : Le marché déteste l’incertitude
Entre la fin du mois de février et le 23 mars pour être précis, le marché s’est totalement effondré.
La raison de cet effondrement est le haut degré d’incertitude. Les gens affirmaient qu’il y aurait entre 10 et 140 millions de morts dans le monde. Je disais alors déjà dans mon podcast que c’était de la folie et que les médias essayaient de faire peur aux gens.
En réalité, nous n’avions pas la moindre idée de ce qui allait se passer. Si le taux de mortalité était de 2% et si toute la population mondiale attrapait le virus, celui-ci pourrait provoquer 140 millions de morts. Une éventualité crédible et terrifiante. Voilà la source du chiffre avancé par le New York Times à l’époque.
C’est le pire usage qui puisse être fait d’une modélisation mathématique. Pourtant, beaucoup de gens ont eu peur.
Lire aussi : La panique est le virus
De plus, toutes les usines chinoises étant fermées, l’économie US étant au point mort et sans aucun plan de relance, qui pouvait prévoir ce qui allait se passer ?
Trop d’incertitude : le marché s’est effondré.
Le 23 mars, le Congrès US a voté contre un plan de relance, et le marché a touché le fond. L’incertitude atteignait alors des niveaux effrayants.
Le lendemain même, le Congrès a voté un plan de relance et le marché est revenu à sa hausse éternelle et a même atteint des sommets historiques.
La théorie 1 a donc contribué aux événements, notamment au cours des premiers mois.
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Théorie 2 : Le marché s’attend à une bonne santé économique
On dit parfois qu’il ne faut jamais parier contre la Fed. Effectivement, si la Réserve fédérale américaine veut vraiment que les gens investissent en Bourse (ou qu’ils vendent leurs actions), elle est parfaitement capable d’obtenir ce qu’elle veut.
Cette approche n’a JAMAIS échoué.
Même pendant la Grande Dépression. En 1920, la spéculation inquiétait la Réserve fédérale qui, plutôt que d’abaisser les taux d’intérêt – ce qui donnait aux gens moins de raisons d’épargner et plus de raisons d’investir (soit en Bourse, soit dans des entreprises) – les a AUGMENTÉS en espérant que les banques et les individus mettraient de l’argent de côté, sauvant ainsi l’économie.
Cela n’a pas fonctionné et le pays a plongé dans la déflation et la dépression.
Un jeune homme du nom de Ben Bernanke écrivit sa thèse de doctorat sur le sujet. Bien des années plus tard, Bernanke était à la tête de la Réserve fédérale pendant la Grande Récession de 2008. Il a abaissé les taux plus rapidement qu’aucun autre président avant lui.
Ce plan de relance nous a permis de sortir du pire effondrement financier depuis 1931, et nous avons ensuite entamé une hausse qui s’est maintenue dix ans.
Je ne vais pas parler en détail de toutes les mesures prises par la Réserve fédérale en ce moment, mais lorsque j’ai parlé au vice-président de la Réserve fédérale de St. Louis, il m’a dit qu’ils faisaient tout ce qui est en leur pouvoir pour A) éviter une déflation et B) remplacer l’argent que l’économie a perdu en raison du confinement.
La Réserve fédérale fixe donc des taux d’intérêt nuls, achète des obligations de sociétés (ce qui revient presque à acheter des actions) et prend d’autres mesures encore.
MAIS il faut normalement entre 12 et 18 mois pour qu’un plan de relance de la Réserve fédérale se révèle efficace. Ce qui signifie que nous n’avons même pas encore ressenti ses effets sur l’économie.
Cela étant dit, le marché a tiré les leçons du passé. Il sait ce qui l’attend, et augmente. C’est une théorie qui tient debout.
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Théorie 3 : Le marché est VRAIMENT déconnecté
De quoi parle-t-on lorsque l’on parle de « la Bourse » ?
Généralement, on parle du S&P 500 ou du Nasdaq. Tous deux battent en ce moment des records historiques.
Mais il y a plus de 8 000 entreprises cotées en Bourse. Ces indices sont-ils vraiment capables de représenter le marché ?
Le Nasdaq et le S&P 500 sont pondérés selon la capitalisation boursière, ce qui signifie que les petites entreprises n’ont presque aucune influence sur le calcul du S&P 500, par exemple.
Au lieu de cela, il est quasi exclusivement représentatif des mouvements de ses 10 entreprises les plus importantes. Les 490 autres entreprises qui le constituent n’ont presque aucune influence sur son évolution.
Ces 10 entreprises sont MSFT, AAPL, AMZN, FB, GOOG (actions A et C), JNJ, BRK, Visa et PG. Elles représentent plus de 25% de la totalité du S&P 500.
Sans cette pondération, le S&P 500 a, en réalité, enregistré une baisse de 1% sur les 12 derniers mois. Il a pourtant augmenté de 12% sur la même période, simplement parce que les 10 actions les plus importantes ont enregistré des hausses à deux chiffres, et malgré le fait que les autres, dans l’ensemble, ont BAISSÉ.
Selon CNBC :
Pour l’instant, cette année, les cinq principales entreprises du S&P 500 –Apple, Microsoft, Alphabet, Facebook et Amazon – ont connu des reprises à deux chiffres. Cependant, seule une seule des cinquante plus petites entreprises du même indice progresse.
Ainsi, 49 des 50 plus petites entreprises du S&P 500 (qui représente plus ou moins les 500 plus grandes entreprises des États-Unis) avaient des résultats NÉGATIFS, alors que les cinq plus grandes enregistraient des hausses à deux chiffres.
Alors, comment définir « la Bourse » ? « Le marché » est-il haussier ou baissier ? Tout dépend du titre de l’article, et de l’angle choisi.
Cette théorie est la meilleure pour le moment, mais il y en a une autre, qui est bien plus dangereuse.
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Théorie 4 : Le marché est haussier PARCE QUE l’économie va mal
Entre chez moi et le Starbucks le plus proche, il y a trois cafés indépendants. J’y allais tous les jours.
J’arrêtais généralement de m’y rendre quand ils préparaient ma commande quotidienne sans me poser de questions dès que j’entrais. Ce genre de choses me rend timide, j’ai l’impression qu’il faut alors à tout prix entamer la conversation. Par conséquent, je préfère aller ailleurs. Mais je ne suis JAMAIS allé chez Starbucks.
Jusqu’à aujourd’hui.
En effet, mes trois cafés indépendants n’ont pas rouvert leurs portes. Le PPP ne les a pas aidés. Le plan de sauvegarde ne les a pas aidés. Les mesures prises pour aider les locataires à payer leur loyer n’ont pas aidé non plus… Ils ont coulé. Il y a des panneaux « à louer » dans la vitrine, et ils ne seront pas remplacés avant un long moment.
Mais Starbucks, une entreprise bien plus grande et bien mieux financée, est en pleine forme. Les clients font la queue jusque sur le trottoir.
Cependant, 20 millions de petites entreprises sont en train de sombrer.
Qui est gagnant ? Les grandes entreprises cotées en Bourse, bien financées. Les Starbucks, Amazon, Netflix, Walmart, etc. Devinez quoi ? Ce sont aussi les entreprises qui influencent le plus le marché pondéré selon la capitalisation boursière.
C’est donc précisément parce que les petites entreprises ont des problèmes, parce que tant de personnes sont au chômage que les grandes entreprises vont bien, et que la Bourse est en pleine forme.
Y AURA-T-IL UNE HYPERINFLATION OU UNE DÉFLATION ?
Les deux éventualités seraient une très mauvaise nouvelle, et je ne crois pas ni à l’une ni à l’autre.
L’hyperinflation a provoqué la Seconde Guerre mondiale. Les Allemands, afin de rembourser les dettes engagées pour financer la Première Guerre mondiale, avaient alors décidé d’imprimer de grandes quantités de monnaie (le mark… ça vous rappelle quelque chose ?).
Mais personne ne voulait de marks. L’Allemagne ne pouvait donc plus emprunter à d’autres pays pour « se rembourser » d’avoir imprimé tant d’argent. La valeur du mark (comme tout ce qui dépend de l’offre et de la demande) s’est donc effondrée.
Une banane coûtait 1 mark une semaine, puis 100 marks la semaine suivante, puis 1 million de marks la semaine d’après.
C’est ce que l’on appelle l’hyperinflation. Imaginez : vous travaillez toute une vie pour mettre 500 000 dollars de côté. Vous êtes fier de vous, et dormez sur vos deux oreilles… et un mois plus tard, ces 500 000 dollars ne vous permettent même pas de vous acheter une boîte de raviolis !
C’est l’hyperinflation. Elle a mis à genoux l’Allemagne, la Russie, l’Argentine, toute l’Amérique du Sud, toute l’Asie, le Zimbabwe, etc. Va-t-elle avoir la peau des États-Unis ?
Lorsque j’ai parlé au vice-président de la Réserve fédérale de St. Louis, il m’a plus ou moins répondu : « Impossible ! » Le dollar est trop demandé. Vers quelle autre monnaie peut-on se tourner ? Les gouvernements étrangers qui souhaitent diversifier leurs monnaies sont très demandeurs de dollars.
Souvenez-vous : la valeur est fonction de l’offre et de la demande.
Ceux qui s’exclament « Ils impriment trop d’argent ! » avant de fondre en larmes comme des nourrissons ne voient qu’un seul côté de l’équation : celui de l’offre. La demande est importante aussi, et elle est extrêmement élevée en ce moment.
Voici quelques gros titres récents :
« Le monde se précipite vers le dollar… »
« Les investisseurs du monde entier se précipitent pour obtenir des dollars US »
La Fed serait RAVIE de voir une inflation en ce moment.
La déflation, en effet, pose un problème majeur :
Admettons que nous souhaitions, vous et moi, acheter une maison à New York. Si nous pensons que les prix vont baisser la semaine prochaine, qu’il y aura une déflation, nous allons patienter. Le propriétaire de la maison va donc paniquer et baisser son prix de vente.
En voyant le prix plus bas, la semaine suivante, nous nous dirons sans doute : « Allez, on attend encore une semaine… » Et ainsi de suite.
C’est ce que l’on appelle une spirale déflationniste… et c’est justement ce phénomène qui provoque les dépressions. Plus personne n’achète rien. Les entreprises ne gagnent donc plus d’argent. Donc elles licencient. Donc on dépense moins. Donc les prix baissent… Etc.
Nous assistons actuellement à une déflation massive, et personne n’en parle. Les loyers ont baissé de 30-40% à New York. Si vous recevez des e-mails de magasins proches de chez vous, qui vous offrent « 20% de réduction ce week-end seulement », ce ne sont pas des soldes. C’est bien le nouveau prix.
La Réserve fédérale tente désespérément d’y mettre fin. Je pense qu’elle y parviendra. Il ne faut jamais parier contre la Fed.
Quant à l’hyperinflation, attendons déjà l’inflation. D’ici quelques années, cependant, si les États-Unis ne parviennent pas à maintenir leur place de leader en matière d’innovation (le potentiel du produit devant toujours être plus grand que le marché pour que les gens investissent dans le dollar), nous pourrions assister à une hyperinflation d’ici trois ou quatre ans environ.
Ce qui nous amène à l’or et au Bitcoin… Mais nous en parlerons la prochaine fois.
QUE FAIRE ?
Ce n’est pas vraiment prévisible. Le Congrès promet de nouveaux plans de relance, alors que les effets de celui de la Réserve fédérale ne se sont même pas encore fait sentir.
Les facteurs d’incertitude sont aussi très nombreux : élections, virus, manifestations, secteur immobilier commercial, dette publique etc.
Pour la première fois, j’investis surtout dans moi-même.
Chaque jour, être entrepreneur amène son lot d’inquiétudes : mes concurrents sont-ils meilleurs que moi ? Mon idée est-elle nulle ? Mes employés couchent-ils les uns avec les autres ? Est-ce que j’arrive à gérer mon anxiété correctement ?
Pourtant, il y a des milliers de milliards de dollars à gagner dans notre économie après les plans de sauvetage : il fait bon être un entrepreneur. C’est une position qui vous permet de détenir autre chose que des dollars. Vous pouvez convertir vos idées en actifs dont le montant peut être exprimé en dollars. En cas d’inflation, vous pouvez donc gagner gros.
Pour la première fois en 15 ans, j’ai hâte d’essayer différentes idées. Tous les nouveaux modèles commerciaux que l’on voit fleurir m’obsèdent un peu, pour être honnête. Comme j’ai été obsédé par le stand-up en 2015, les échecs quand j’avais 17 ans, par le poker quand j’en avais 30… Aujourd’hui, mon obsession, c’est l’entrepreneuriat.
Je n’ai jamais aimé ce rôle, même si j’ai lancé plein d’entreprises. Beurk ! J’ai tout perdu parce que j’étais entrepreneur. Mes amis, ma famille, mon argent. Parfois, tout se passait bien, mais la plupart du temps, les résultats étaient absolument désastreux.
Il faut dire que je n’ai jamais vraiment été enthousiaste… jusqu’à aujourd’hui. Je suis enthousiaste maintenant. Un vieux singe qui apprend de nouvelles grimaces.
Il n’est jamais trop tard. Jamais.
J’aime de moins en moins l’idée de ces « activités d’appoints ». Personne n’a envie de gagner 8 dollars de l’heure en promenant des chiens. Ce n’est pas une activité d’appoint.
Je parle de quelques idées spécifiques qui peuvent vous permettre rapidement de mettre du beurre dans les épinards, mais qui peuvent aussi, dans le meilleur des cas, devenir des entreprises susceptibles de peser plusieurs millions de dollars. Je ne parlerai pas d’une idée à moins qu’elle ait ce genre de potentiel.
Étant donné le degré d’incertitude, mieux vaut investir dans soi-même plutôt qu’en Bourse. Je me fie plus à moi-même et à mes idées qu’à Procter & Gamble ou Microsoft.
Quelqu’un m’a demandé hier : « Quand la vie pourra-t-elle reprendre son cours de 2019 ? »
La réponse ? Jamais… et c’est une bonne chose. Cette époque est FINIE. C’est le GRAND REDÉMARRAGE.