Quels sont les facteurs de déstabilisation pour 2016 ?
Le premier d’entre eux, je vous en ai longuement parlé ces derniers temps : il s’agit du dollar.
Sans vouloir lui faire endosser tous les malheurs du monde, nous devons reconnaître que la remontée du dollar depuis fin 2012-début 2013 a accentué un peu plus les déséquilibres économiques en cours, que nous parlions de la chute des matières premières, des difficultés des pays émergents (souvent endettés en dollars) en général et de la Chine en particulier.
Souviens-toi de l’été dernier
Ce dernier risque de déstabilisation est plus sérieux qu’il n’en a l’air. Pékin doit jouer avec sa politique monétaire pour à la fois maintenir le yuan arrimé au dollar et offrir les mesures d’assouplissement du crédit qui pourraient relancer l’économie, l’investissement et la consommation. Or, très clairement, cette position devient de plus en plus difficile à tenir.
Pékin en a donné un signal très clair en décembre dernier en annonçant que le yuan ne serait plus lié au dollar uniquement mais à un panier de devises.
Pour les Etats-Unis, le pire des scénarios serait que la Banque populaire de Chine décide une dévaluation massive de son yuan et déstabilise en profondeur non seulement les marchés boursiers mondiaux — un bis repetita de ce qui s’est passé pendant l’été dernier — mais que, surtout, elle provoque une sorte de course mondiale à la dévaluation.
L’assassin était en (or) noir
Autre facteur de déstabilisation que nous ne devons pas négliger pour les mois à venir : le secteur des obligations high yield, à savoir à hauts rendements. Un terme suffisamment technique pour cacher une triste réalité : si le rendement est très important, c’est que le risque l’est tout autant. Eh oui, on n’engrange pas un rendement de 20% en misant sur les actifs les plus sûrs de la planète. D’ailleurs, on ne les obtient pas non plus en prenant quelques risques bien maîtrisés.
Non, pour obtenir un bon et gras rendement, il faut du moche, du pourri, de l’extrêmement dangereux.
Voici l’évolution sur un an d’un tracker répliquant l’indice iShares iBoxx High Yield Corporate Bond. Quand l’indice baisse, c’est que les obligations baissent, que les investisseurs les délaissent, et donc que les rendements explosent. En clair, quand cela baisse, ce n’est pas bon signe :
Parmi ces actifs high yield, vous trouverez, par exemple, les dettes d’entreprises pétrolières américaines qui se sont lancées dans de pharaoniques projets de production de pétrole de schiste quand le baril était au plus haut. Depuis, la bise est venue, le pétrole ne dépasse que très péniblement et sous l’influence de tensions géopolitiques majeurs la barre des 35$, et tout ce petit monde est terriblement à la peine.
Pour le moment, je ne vois aucun facteur permettant de parier sur une hausse du pétrole sur le long terme. La situation (le rapport entre l’offre et la demande) évoluera peut-être dans quelques mois mais, en attendant, tout le secteur pétrolier mise sur un baril au plus bas pendant très longtemps encore.
C’est à partir de cette évaluation — qu’elle soit vraie ou fausse — que sont établis les contrats à terme, ces fameux futures sur lesquels repose l’industrie pétrolière. C’est aussi à partir de cette évaluation que les banques décident ou pas d’accorder de nouveaux prêts ou aménagements de remboursement aux producteurs de pétrole. Si le crédit se tarit — et les derniers chiffres montrent que c’est le cas — les faillites vont s’accélérer.
La conjonction de l’indigestion
Vous le savez, la concordance et la répétition sont souvent des facteurs de risque.
C’est le principe bien connu du « un verre, ça va. Trois, bonjour les dégâts ».
Un marché qui perd la boule, ça va.
Deux, cela devient très compliqué.
Trois, c’est la catastrophe. Et les gros dégâts.
Or observez ce qui se passe en ce moment. Deux des principaux marchés boursiers de la planète sont dans un sale état et les autorités s’acharnent à tenter de les remettre sur pied.
Ces deux marchés, ce sont la Chine et les Etats-Unis.
Leur point commun ? Trop de liquidités, trop d’interventions. En Chine, le krach de cet été a été suivi par une intervention massive des autorités pour remettre le marché à flot, réguler la volatilité. En parallèle, et ce depuis des mois, voire des années, Pékin fait tout ce qu’elle peut pour encourager particuliers et entreprises à miser en Bourse en libéralisant l’accès et en lançant de nouveaux produits financiers extrêmement attractifs.
Les autorités américaines n’ont rien fait de vraiment très différent. En ouvrant les vannes des liquidités et en maintenant les taux directeurs de la Fed extrêmement bas, elles ont encouragé la ruée sur les marchés actions.
Maintenant, d’un côté comme de l’autre, on aimerait revenir à la « normale », ou du moins à plus de « normale ». Mais comment faire quand les intervenants sur les marchés sont persuadés que les autorités interviendront de nouveau massivement en cas de pépin ? Janet Yellen ne cesse de rassurer les investisseurs sur sa volonté de préserver Wall Street, et Pékin fait tout ce qu’il peut pour faire repartir à la hausse les Bourses de Shanghai et de Shenzhen.
La tentation de la désintégration
Pour conclure ce tour d’horizon des principaux risques qui menacent 2016, intéressons-nous à un risque plus géopolitique : celui de la désintégration.
Les récents conflits ou sources de tensions géopolitiques — et économiques — partagent presque tous un point commun : la désintégration politique.
Dans la Zone euro, le risque d’un Grexit ne peut toujours pas être écarté, le problème de la dette grecque étant très loin d’être réglé même s’il ne fait plus la une de la presse.
Au niveau européen, le Brexit est plus que jamais sur le tapis.
Et nous connaissons tous les conséquences dramatiques — aussi bien humaines, politiques, économiques — de la désintégration de la Syrie, de la Libye, du Yémen ou encore de l’Irak. L’implosion de ces Etats a ouvert la porte non seulement au prétendu Etat islamique mais aussi à de multiples groupes qui détruisent progressivement tout espoir de stabilisation non seulement politique mais aussi économique dans ces régions.
Les conséquences se font ressentir jusqu’en Europe où la question de l’accueil des migrations nourrit moult débats et problèmes jusqu’à menacer de faire imploser l’espace Schengen. D’un point de vue plus strictement économique et financier, nous avons vu que le baril de pétrole n’était pas complètement insensible à la montée des tensions et incertitudes dans la région.
Les dangers et les menaces que font peser cette désintégration politique sont trop nombreux et complexes pour que je les traite en intégralité — et avec la prudence qu’ils méritent — dans ces lignes, mais il est évident que nous aurons de nouveau à nous heurter à ce risque dans les mois qui viennent.
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