Vous êtes dans le trajet en ascenseur le plus important de votre vie : vous avez 10 secondes pour réussir à convaincre par votre « elevator pitch ».
Beaucoup de bouquins ont été écrits à ce sujet – mais pas la peine de perdre votre temps à les lire, tous racontent des salades.
J’ai été des deux côtés de la barrière. Des gens m’ont déballé leurs arguments mais le plus souvent, c’est moi qui ai essayé de convaincre : j’ai été effrayé, j’ai été mort d’envie et de peur de demander à quelqu’un de me donner, de me vouloir, de m’aimer, tout cela dans l’espace d’un ascenseur ou dans le temps que prend un trajet en ascenseur.
Ce qui fut peut-être le plus difficile pour moi fut ma web série pour HBO. Je devais aborder des inconnus dans les rues de New York à 3 heures du matin et les convaincre en 5 secondes de me confier leurs secrets les plus intimes plutôt que de me tuer.
Pas vraiment un « elevator pitch » mais l’idée est grosso modo la même. J’ai acquis beaucoup de pratique. J’ai ainsi abordé plus de 3000 personnes de but en blanc.
Dans certains cas des gens ont tenté de me tuer. Une fois j’ai été poursuivi. D’autres fois, certains m’ont ouvert leur cœur, ce dont je leur en suis infiniment reconnaissant.
Les idées ci-dessous ont fonctionné pour moi les centaines de fois où j’ai dû me montrer persuasif, soit par écrit soit à l’oral, en affaires, en amitié ou en amour. J’espère que l’adaptation de ces idées à votre sauce pourront fonctionner pour vous. C’est vous qui décidez.
A) Qui êtes-vous ?
Les gens veulent savoir qu’ils parlent à quelqu’un de bien, d’honnête, de sérieux, en qui ils peuvent avoir confiance, voire même qu’ils peuvent apprécier ou aimer.
Oui, aimer.
Ils ne vous aimeront pas simplement en lisant votre CV.
Vous devez utiliser des procédés d’interprétation du théâtre. Imaginez ce que votre corps ressentirait si votre interlocuteur avait déjà dit « oui » avant même que vous n’ouvriez la bouche.
Vous vous tiendrez debout, le dos droit, souriant, paumes ouvertes, prêt à conclure le marché. Vous devez vous comporter ainsi dès le début de votre exposé.
Si vous êtes avachi, la tête en avant, votre cerveau n’est pas bien connecté à votre système nerveux. Lorsque vous êtes voûté, non seulement vous n’utilisez pas pleinement le potentiel de votre cerveau mais en plus vous semblez peu digne de confiance.
B) Détendez-vous
Lorsque vous êtes angoissé et nerveux, pensez à votre respiration.
En général, respirer consiste en des inspirations courtes et peu profondes dans le haut de la cage thoracique.
Il faut donc faire le contraire avant un exposé de 10 secondes.
Respirez profondément jusque dans votre estomac. Il a été démontré qu’il suffit de trois respirations profondes au niveau de l’estomac pour détendre totalement l’esprit et le corps.
Les gens sentent cela. Cela rend confiant et détend.
A présent, même si vous n’avez pas prononcé un seul mot, vous avez probablement effectué les deux choses les plus importantes pour convaincre quelqu’un.
C) Euuuh. Ouais. Euuuh. Mmmm-Hum. Euh-Heuh
J’ai du mal avec toutes ces onomatopées. Il semble naturel de dire « ouais », « ok » ou « euh-heuh » etc.
Mais sachez que les gens vous perçoivent comme quelqu’un de stupide lorsque vous faites cela.
Ne dites rien lorsque quelqu’un parle. Lorsque la personne a fini de parler, attendez deux secondes avant de répondre. Elle peut ne pas avoir terminé encore. En plus, cela vous donne le temps de réfléchir à une réponse. Si vous réfléchissez alors que la personne vous parle, c’est que vous ne l’écoutez pas.
Les gens savent inconsciemment lorsque vous ne les écoutez pas. Alors ils vous disent « non ».
D) Les quatre U
Nous arrivons à présent au cœur du sujet : les rouages de la persuasion.
Remarque : j’ai googlisé « les 4 U » à plusieurs reprises et à chaque fois j’obtiens 4 U différents. Je vais donc utiliser les 4 qui ont le mieux marché pour moi.
Croyez-moi, cela fonctionne. Il ne s’agit pas d’un moyen de convaincre quelqu’un de faire quelque chose qu’il ne veut pas faire, mais cela vous permet de poser votre vision en une phrase ou deux puis de l’exprimer de manière claire.
C’est un moyen d’établir un lien et de se connecter aux autres avec leurs besoins, pas simplement vos propres volontés.
Vous pouvez utiliser ce moyen pour un « elevator pitch« , lors d’un rendez-vous galant, avec vos enfants, votre mère, etc. Cela fonctionne.
Lorsque vous parlez, pensez à ces quatre « U » :
- Urgence. Pourquoi le problème que vous résolvez est urgent pour toute une population. Par exemple : « Je ne peux jamais avoir un taxi lorsqu’il pleut ! »
- Unique. En quoi votre solution est-elle unique : « Nous réunissons une centaine de services auto en une seule application. Nous sommes les seuls à le faire. »
- Utile. En quoi votre solution est-elle utile pour la vie des gens à qui vous projetez de vendre ou à qui vous délivrez votre message : « Nous vous amènerons là-bas à temps. »
- Ultra-Spécifique. Cela montre qu’il n’y a pas supercherie : « Notre application sait où vous êtes. Votre carte de crédit est pré-chargée. Vous appuyez sur une touche et une voiture apparaît dans les 4 à 5 minutes qui suivent. » Vous l’avez deviné, l’exemple que je donne est celui d’Uber mais vous pouvez prendre n’importe quel autre exemple.
J’ajouterai à ces quatre « U » deux suppléments :
- Convivial. Autrement dit, il faut qu’il soit le plus facile possible à votre interlocuteur de dire « oui ». Comme par exemple une garantie de remboursement ; ou un cadeau ; ou plus d’équité ; ou des témoignages de gens que vous connaissez tous les deux. Etc.
- Preuve irréfutable. Elle peut être sous la forme de bénéfices ; ou d’une statistique mesurable ; ou de témoignages ; ou d’un bon compagnon de drague ; peu importe.
E) Désir
Vous devez satisfaire les désirs de l’autre personne afin qu’elle dise « oui ».
Même si nous voudrions croire le contraire, les gens agissent principalement par intérêt.
Moins ils en savent sur vous, plus ils agiront par intérêt parce que le contraire pourrait potentiellement les mettre en danger. Nous savons tous que les enfants ne devraient pas accepter un bonbon de la part d’un inconnu.
Dans un « elevator pitch« , l’investisseur est l’enfant, ce que vous proposez est le bonbon et vous êtes l’inconnu. Par conséquent, son premier réflexe, à moins que vous ne proposiez un bonbon super-délicieux, est de dire « non ».
Assurez-vous donc de rendre votre bonbon plus attirant en y ajoutant ses désirs.
Mais quels sont ses désirs ?
- Reconnaissance.
- Rajeunissement.
- Relaxation.
- Soulagement.
- Religion.
- Rémunération.
- Résultats.
- Revanche.
- Romance…
Si vous pouvez l’aider à résoudre ces problèmes ou désirs urgents, alors il y aura plus de chance qu’il vous dise « oui ».
Je ne sais pas ce que vous vendez mais j’espère que ce n’est pas pour satisfaire un désir de revanche. Cependant, si c’est le cas, ne proposez rien de violent.
La seule fois où je devais vendre de l’amour dans un ascenseur, j’ai dû faire trois choses : lui dire que sa vie sera belle, m’assurer que je connaissais son adresse et son nom de famille et lui envoyer un ourson en peluche et des fleurs le lendemain.
Mais c’est une autre histoire.
F) Objections
Tout le monde aura des objections au départ.
Tout le monde vous répondra avoir été abordé des milliers de fois auparavant.
Savez-vous combien de fois j’ai été abordé pour avoir une relation sexuelle dans un ascenseur ?
Jamais.
Mais sans doute beaucoup d’autres personnes l’ont été et vous devez faire face à leur objection.
En voici la liste (je vous donne la solution entre parenthèses) :
- Pas le temps (c’est vrai. Vous êtes dans un ascenseur. Votre interlocuteur n’a donc que le temps du trajet en ascenseur. La clé ici est d’y aller franco et d’agir comme quelqu’un qui mérite qu’on l’écoute).
- Pas intéressant (vous pouvez résoudre ce problème en exprimant avec précision l’urgence du problème).
- Pas de différence perçue (mais vous avez votre différence unique à portée de main).
- Pas de croyance (proposez la preuve irréfutable que cela fonctionne).
- Pas de décision (rendez sa décision aussi conviviale que possible).
- Un grand pouvoir implique de grandes responsabilités.
La plupart des gens ne possèdent pas le pouvoir de persuasion. Ils se prennent toujours les pieds dans l’un des points décrits plus haut. Il faut de la pratique et beaucoup de travail.
Mais il ne s’agit pas que de persuasion. Il s’agit de connexion.
Il s’agit de deux personnes, le plus souvent qui ne se connaissent pas, qui se retrouvent dans le même espace mental et physique et qui tentent de se comprendre et de trouver un terrain d’entente.
Il ne s’agit pas d’argent. Il ne s’agit pas d’une idée. Il ne s’agit pas d’un oui ou d’un non.
Il s’agit de deux êtres qui tombent amoureux.