Quand j’avais 17 ans, alors que je conduisais, je me suis mis à rêvasser. Je revenais d’une leçon d’échecs et j’avais battu mon prof, à ma grande surprise.
Il avait été étonné et avait rapidement remis les pièces en place afin de pouvoir se venger avant la fin du cours. Mais ça n’avait pas d’importance. Je l’avais battu ! Je l’avais écrasé.
Et j’ai renversé un type avec ma voiture. Je roulais à 95 km/h, je n’ai pas vu le feu rouge et je suis rentré dans une voiture familiale.
Les deux voitures ont effectué une ronde. Toutes les vitres ont explosé.
Les voitures ont arrêté de tourner. L’homme semblait inconscient. J’ai couru vers la maison la plus proche et j’ai appelé le 911, puis mes parents. Je pleurais et je tremblais.
Mais je n’étais pas blessé. Je n’avais pas une égratignure.
La police m’a demandé : « Que faisiez-vous ? Étiez-vous en train de boire ?
— Je revenais d’une leçon d’échecs.
— D’échecs. Une leçon ?
— Oui.
— Étiez-vous en train de boire ?
— Non. »
L’homme que j’ai renversé était un vieil homme. Je ne sais pas quel âge il avait. Sa jambe était cassée. Une ambulance l’a emmené.
La voiture de mon père a été réduite en purée.
J’avais honte. Je me dégoutais. Je n’ai plus jamais voulu conduire. Encore aujourd’hui, des décennies plus tard, lorsque j’approche d’une intersection, je revois souvent de façon très claire, comme dans une hallucination, ce break qui s’approche de l’intersection exactement au même moment…
Les gens disent : « Je n’ai aucun regret car si cela ne s’était pas passé ainsi, ma vie ne serait pas la même aujourd’hui. »
C’est n’importe quoi.
Ma vie a surtout été nulle.
Je me réveille en plein milieu de la nuit, effrayé. Je me réveille le matin, nerveux. La nuit, je m’endors en ayant peur de me réveiller.
J’ai pris de très mauvaises décisions. J’ai renoncé à faire des choses que j’aime pour gagner de l’argent en faisant des choses que je déteste.
Vous savez ce qu’est la gestion d’un hedge fund ? Cela nécessite des efforts ininterrompus pour que des gens, dont vous devez lécher les bottes, vous confient leur argent. Des gens que vous détestez.
Vous savez ce que c’est que de diriger une agence de pub ? C’est un effort ininterrompu pour que des gens à qui vous léchez les bottes deviennent des clients. Des gens que vous détestez.
Les clients dictent votre créativité.
J’avais peur pour ma santé. J’avais peur il y a de nombreuses années, quand ma petite amie est tombée enceinte et que je ne savais pas si j’étais prêt.
Je déteste me réveiller au milieu de la nuit et sortir mon bloc-notes de serveur pour additionner les chiffres de mon compte en banque. Zéro. Merde.
Je m’allonge dans mon lit et je n’arrive pas à respirer, et ma copine de l’époque m’a dit : « Respire. » Je ne pouvais pas. Pourquoi je ne pouvais pas ? Pourquoi ça m’arrivait à moi ?
J’ai des regrets.
J’en ai vraiment.
Je veux arrêter de perdre du temps à cause des 8 travers suivants.
1. LE SENTIMENT D’ILLÉGITIMITÉ
Actuellement, je suis à L.A. Je propose le concept d’une émission de télévision à plusieurs chaînes.
L’émission sera GÉNIALE parce que je sais que personne n’a jamais rien tenté de tel auparavant.
Si vous tentez ce que personne n’a jamais fait, il est facile de douter. On peut se dire par exemple : « Qui suis-je pour être le premier ? Qui suis-je, bordel ? Hein ? Un dur à cuire ? »
(J’écris ça chez Moe’s, aux studios Fox, en ce moment même.)
Mon propre cerveau me harcèle. Il n’y a rien de mal à douter.
Voici comment j’utilise les doutes : je les transforme, la peur de moi-même devient un « exercice mental ».
Je fais semblant d’être celui qui prend la décision. Je fais semblant d’être à la réunion et celui en charge de décider soulève des doutes.
Alors, je réponds mentalement. Je prononce la réponse à haute voix. Je m’entraîne. Je visualise Barack Obama en train de prononcer l’un de ses discours, sûr de lui, et j’imagine que les mots qui sortent de sa bouche sont les mots qui font disparaître le doute.
Si l’on part du principe que je suis prêt, les doutes deviennent une boussole pour les questions auxquelles je dois encore répondre pour être mieux préparé.
Les doutes travaillent POUR moi. Et non l’inverse.
2. LE MANQUE D’ATTENTION
Il y a 20 ans, j’ai présenté un projet à FedEx. Nous avons passé toute la nuit à travailler sur le projet.
Le type qui devait envoyer le projet l’a fait à la première heure le lendemain matin. Bon travail !
Seulement… il l’a envoyé en première classe… par la US Post Office.
J’ai dû le virer. Trop de gens avaient travaillé trop dur. FedEx n’a même pas répondu à nos appels après avoir reçu l’offre par la Poste.
Je suis désolé pour le gars que j’ai dû virer. J’aurais peut-être pu mieux gérer la situation. Mais tout le monde était contrarié, on avait l’impression d’avoir sacrifié du temps avec nos familles pour travailler là-dessus, et tout était foutu.
L’insouciance nuit aux emplois, au respect, aux entreprises, elle coûte de l’argent et du temps.
Et on ne rattrape pas le temps.
3. LES SOUCIS DE SANTÉ
On ne peut pas être créatif, social, proactif, si on doit rester au fond du lit car on est malade.
Mais on ne peut pas contrôler la maladie !
Dans 90% des cas, lorsque je suis malade, c’est parce que je suis épuisé. Ou trop stressé. Ou parce que je n’ai pas assez dormi. Ou que je n’ai pas bien mangé. Ou que j’ai trop bu.
J’ai eu un rhume/la grippe il n’y a pas si longtemps. J’avais de la fièvre, je tremblais et toussais sans arrêt ; je devais me rendre à Londres, et la situation a empiré.
J’ai été complètement épuisé.
Il faut savoir se reposer et se ressourcer.
4. L’INCERTITUDE
Est-ce que c’est la bonne fille ? Est-ce que c’est la bonne chose à faire ?
Une fois que vous avez pris une décision, ne revenez pas dessus. Ne lâchez pas.
Dans le monde du stand-up, une compétence est importante : c’est la détermination.
Ne renoncez pas à une blague, même si elle provoque un ou deux moments de silence et que cela vous effraie. Concentrez-vous sur la blague. Concentrez-vous sur le personnage.
Restez fidèle aux décisions que vous avez prises. N’hésitez pas une fois que vous êtes marié. Une fois que vous avez eu un enfant.
Prenez vos décisions en fonction de vos valeurs fondamentales.
Est-ce que cette décision :
- améliorera mes relations avec les autres ?
- me permettra de mieux maîtriser les choses que j’aime ?
- renforcera ma liberté et augmentera le nombre de décisions que je prends chaque jour, celles qui sont les miennes et non celles de qui que ce soit d’autre ?
Si oui, alors vous avez pris (vous prendrez) une bonne décision.
Si ce n’est pas le cas, soit vous ne prenez pas cette décision, soit vous trouvez comment vous rapprocher des trois points que je viens d’évoquer malgré la situation.
Mais les hésitations font perdre du temps. Et les huit éléments que je suis en train de décrire permettent de regagner ce temps perdu.
TOUT EST QUESTION DE TEMPS !
Vous ne pouvez pas hypothéquer un SEUL moment pour un avenir meilleur.
5. L’AVEUGLEMENT
Je vois ça se produire tous les jours. Quelqu’un écrit un livre. Monte une entreprise. Lance une idée. Ils ont ce que j’appelle la « distorsion du fumeur de crack ». Les gens s’imaginent que leur projet est le meilleur de l’univers.
Lorsque je commence un projet, je me demande toujours : « Est-ce que je me fais des films ou est-ce que tout est ok ? »
Est-ce que cette idée d’entreprise est ok ? Est-ce que ce script est ok ? Ma performance de ce soir était-elle ok ? Mon article était-il ok ??
Soyez le scientifique de votre vie.
6. LA TENTATION DE PARESSER
J’ai une idée. Une réunion a lieu pour discuter de cette idée. Tout le monde l’adore.
Maintenant, je dois la coucher sur le papier. L’envoyer à tout le monde pour que nous puissions tous avancer sur le projet.
Mais il y a la série Love sur Netflix, et je veux la voir. (Créée par Judd Apatow. Une super sitcom.)
Faites d’abord ce que vous avez à faire pour améliorer votre vie. La paresse se mérite, en quelque sorte.
« Ai-je mérité le droit d’être paresseux ? »
(J’adore Love.)
7. LA STAGNATION
J’ai fait un super podcast avec Stephen Dubner [NDR : journaliste américain, auteur du livre Freakonomics]. C’était le podcast « Question du jour ».
Il était téléchargé des millions de fois chaque mois. On s’amusait bien. On se réunissait et, ce podcast, c’était comme une fête.
Mais nous ne nous améliorions pas. Nous répondions sans cesse aux mêmes questions. Et le trafic n’augmentait pas. Il ne diminuait pas, mais nous ne ressentions pas cette exaltation que provoque l’évolution.
Nous avions d’autres projets, qui nous prenaient du temps. Cela nuisait aux projets qu’on aimait.
Pas d’évolution = évolution négative.
Alors on s’est arrêtés. Nous sommes revenus à nos autres projets.
(« Question du jour ». J’adorais cette émission !)
8. LES EXCUSES
J’aidais une amie à apprendre le texte d’une pièce. Je lui ai dit : « D’accord, je viendrai à 18 h et on révisera ton texte. »
Je me suis rendu chez elle.
Elle m’a dit : « Une amie fait une émission, on va d’abord passer la voir. Je lui ai promis de la soutenir, tout comme elle l’a fait en venant voir mon spectacle. »
Alors nous y sommes allés. Ensuite elle a ajouté : « Allons d’abord dîner. »
Puis : « C’est l’anniversaire de l’une de mes amies. Elle vient de m’envoyer un texto. On y passe deux minutes, juste pour dire bonjour. »
Etc, etc. Après tous ces arrêts intempestifs, il était 22 h.
« Je suis fatiguée. On peut revoir le texte demain ?
—Je ne suis pas disponible. Mais bonne chance. »
Si vous devez faire quelque chose qui améliorera votre vie, alors ne vous cherchez pas d’excuses. Hélas, c’est ce que je fais. Tout le monde le fait. Mais ne le faites pas.
Si vous évitez ces huit mauvaises habitudes (en bonus : ne renversez personne avec une voiture), vous aurez une belle vie.
Quelqu’un m’a dit : « Ce n’est pas réaliste. »
Bonne chance. Je vous souhaite le meilleur.