La rénovation des infrastructures pourrait générer des gains pour les investisseurs avertis
On a l’impression que, hier encore, Donald Trump faisait campagne pour son premier mandat de président.
Alors qu’il faisait relativement figure de nouveau venu, sur la scène politique, il a écrasé ses opposants les plus expérimentés en mettant en avant un programme nationaliste prônant l’auto-détermination économique : la conviction que les Américains pouvaient s’enrichir en investissant sur l’Amérique.
Toutefois, quatre ans plus tard, l’un des éléments clés de son programme – les investissements d’infrastructures – n’a toujours pas été réalisé.
La carence d’investissements d’infrastructures passe souvent inaperçue, tant qu’une catastrophe n’est pas arrivée. Et je ne sais pas si vous avez remarqué les gros titres, dernièrement, mais il semblerait que cette catastrophe ait frappé…
Je crois que nous allons assister à une grande modernisation des infrastructures, au cours des années à venir.
Les investisseurs devraient commencer à se préparer dès maintenant.
La découverte de fissures dans les fondations
Le manque d’infrastructures est l’une des principales raisons expliquant que l’Amérique soit si peu préparée au COVID-19.
- Les infrastructures permettant de produire des équipements, fournitures et tests vitaux sont insuffisantes.
- Les infrastructures permettant de mobiliser rapidement l’aide financière destinée aux particuliers et aux entreprises sont insuffisantes.
- Et les infrastructures permettant ne serait-ce que de coordonner les mesures en réponse à la crise au niveau national sont insuffisantes.
Il n’est pas difficile de trouver d’autres types d’infrastructures faisant défaut.
Sur tout le territoire des États-Unis, à l’heure actuelle, 47 052 ponts sont en mauvais état et environ 235 000 de structures ont besoin d’être réparées ou remplacées.
Sur les autoroutes, 1 kilomètre sur 8 de chaussée doit être réparé, ce qui représente des réfections s’élevant à plus de 420 Mds$, au total.
Nous considérons souvent les infrastructures comme acquises. Mais ces dernières années, des défaillances infrastructurelles plus visibles ont attiré l’attention du public.
En voici deux exemples : les digues défaillantes de La Nouvelle-Orléans, lors de l’ouragan Katrina en 2005, et le réseau électrique défaillant qui a provoqué le gigantesque feu de forêt dit « Camp Fire« , en Californie, en 2018.
Les Américains se souviennent peut-être également d’exemples moins visibles, comme la crise sanitaire de Flint, en 2014, provoquée par des réseaux et conduits de distribution d’eau potable vieux de plus de 100 ans dans certains cas.
Tout compris, on estime qu’il faudrait 1 000 à 2 000 Mds$ pour réparer des parties cruciales des infrastructures américaines.
Le rapport relatif aux infrastructures américaines, Infrastructure Report Card, publié par l’American Society of Civil Engineers (« ASCE ») [NDR : la société américaine de génie civil] en 2017, a attribué la note D+ aux infrastructures américaines.
Certes, l’ASCE a une arrière-pensée : faire démarrer des chantiers. Mais là n’est pas la question. Tout autour de nous, les infrastructures ont désespérément besoin d’être réparées.
Le rapport a passé en revue l’état des infrastructures actuelles selon 16 critères, et établi des recommandations d’amélioration.
Parmi les défaillances constatées dans le rapport :
- 42% des principales autoroutes du pays sont considérées comme congestionnées ;
- sur les 84 000 barrages des États-Unis, 14 000 sont considérés comme « très dangereux » et 4 000 sont dégradés ;
- la plupart des lignes de transmission et d’alimentation électrique ont été construites dans les années 1950 et 1960 pour durer 50 ans ;
- plus de la moitié de la population américaine vit à moins de 5 kilomètres d’une décharge de produits toxiques, plus de 500 de ces décharges sont situées en zone inondable.
Comme je l’ai déjà indiqué, la question des investissements d’infrastructures n’est pas vraiment nouvelle.
Vers la fin de la première année de mandat de Trump, les médias et les investisseurs pensaient que ces investissements feraient partie intégrante du programme présidentiel.
Toutefois, plusieurs années de rivalités politiques ont empêché le vote des grands plans de dépenses par ailleurs universellement populaires.
Il se pourrait que cela change, avec l’élection présidentielle imminente et le ralentissement économique.
Un besoin accru de meilleures infrastructures
D’abord, des milliards de dollars d’aides financières seront nécessaires pour soutenir l’économie et les gouvernements locaux, lorsque le confinement sera levé.
Face au caractère inédit du COVID-19, un plan de stimulus colossal a déjà été approuvé afin de soutenir une économie quasiment à l’arrêt pendant tout un mois.
Toutefois, les conséquences du confinement lié au COVID pourraient freiner l’économie pendant un certain temps.
Pour réduire ces impacts, je pense que le gouvernement va considérer le stimulus comme le principal outil permettant de restaurer la croissance économique.
Si un stimulus supplémentaire est nécessaire au cours des prochains mois, les infrastructures pourraient en être les principales bénéficiaires.
Premièrement, les infrastructures faisaient déjà partie du programme démocrate avant le COVID-19. En janvier, les démocrates ont présenté un plan de financement d’infrastructures de 760 Mds$ sur 5 ans intitulé Moving Forward Framework destiné à favoriser les investissements dédiés aux autoroutes, aux ports, aux voies ferrées et à la bande passante, entre autres.
Deuxièmement, les investissements d’infrastructures représentent l’une des promesses non tenues de la présidence de Trump.
À l’approche de l’élection, je pense que les deux candidats parleront des investissements d’infrastructures comme un thème majeur de leur programme. Toutefois, pour Trump, il est particulièrement pressant de tenir cette promesse avant l’automne.
Et heureusement pour lui, l’un des obstacles au vote de ce plan d’investissement sur les infrastructures va bientôt disparaître.
Auparavant, il était impossible de faire accepter ces investissements par bon nombre de républicains anti « big government » [NDR : contre un État trop omniprésent dans la vie des citoyens]. Toutefois, si la situation devait s’aggraver au point de menacer la réélection de Trump, alors ils pourraient être poussés à reconsidérer la question.
Bien que la politique de Trump en faveur de vastes dépenses publiques soit contraire aux convictions politiques traditionnelles des républicains, l’opportunité offerte aux législateurs de gagner en popularité dans leurs régions en obtenant des financements pour des projets locaux sera peut-être trop irrésistible pour être rejetée.
Et en plus, considérant les 6 000 Mds$ de dépenses de stimulus récemment adoptés, la notion de responsabilité budgétaire est partie en fumée.
La première vague des lois de stimulus correspondait surtout à des aides aux particuliers et aux entreprises.
Mais ce type de stimulus ne peut durer, tout simplement. Tôt ou tard, le gouvernement devra encourager la croissance économique en investissant dans des projets tangibles qui offrent des emplois aux gens à différents niveaux de compétences.
Les principaux bénéficiaires
Deux types d’infrastructures sont, principalement, « dans les tuyaux » : les infrastructures physiques et les infrastructures technologiques.
Les infrastructures physiques telles que les ponts et les routes mentionnés plus haut font partie des choix les plus évidents. Ces types de projets bénéficieraient aux sociétés d’ingénierie, aux sociétés de construction, aux entreprises qui produisent et distribuent les matériaux et engins, etc.
D’autres projets d’infrastructures technologiques pourraient également être mis en oeuvre : des choses comme l’augmentation des investissements dédiés à la cybersécurité, plus de financements pour la recherche médicale, l’éducation, voire même les engins spatiaux et l’exploration de l’espace.
Même si bon nombre de ces éléments n’apparaissent pas comme des infrastructures traditionnelles en soi, ils constituent le tissu de notre société et représentent le type de biens communs qui, souvent, ne sont pas financés par des fonds privés.
Ces types de programmes comportent un avantage supplémentaire : on peut les lancer et les déployer plus rapidement qu’un projet de pont (qui peut exiger deux ans de conception avant que la construction ne démarre véritablement).
Ces projets devront démarrer un jour. Si un budget n’est pas dédié à la construction, les politiciens locaux n’investiront probablement pas dans les phases de conception initiales.
Ce travail de conception est absolument nécessaire, avant qu’un projet à grande échelle ne puisse même envisager de créer des emplois et des investissements au plan local en vue de stimuler l’économie.
Sans ces financements, le retard accumulé sur les réparations nécessaires s’accroît, et la possibilité de lancer rapidement des projets est d’autant plus retardée.
La nécessité de dépenser afin de réparer et d’améliorer les infrastructures américaines est inévitable.
Mais une question demeure : le Congrès saisira-t-il enfin cette opportunité en 2020 ?
Si la réponse est « oui », les investisseurs devraient se préparer à un boom majeur au sein des entreprises concernées.