En 2006, j’ai dû fermer mon propre fonds.
Ceux qui y avaient investi ont été furieux contre moi : ils m’avaient fait confiance pour que j’investisse dans ce que je considérais comme les meilleurs hedge funds. J’avais analysé près d’un millier de fonds pour les identifier. Mes performances enregistraient une hausse quasi mensuelle.
J’avais réussi à lever de l’argent. J’avais une entreprise. Mais je n’arrivais pas à dormir la nuit car je ne comprenais pas pourquoi mes fonds rapportaient de l’argent.
Lorsque je n’arrive pas à comprendre quelque chose et que personne n’est capable de me l’expliquer, alors je fais des cauchemars : en particulier lorsqu’il y a beaucoup d’argent en jeu. Alors j’ai retiré environ 70 M$ des fonds dans lesquels j’avais investi et je les ai rendus à mes investisseurs. Ils ont été très mécontents, bien qu’ils aient tous gagné de l’argent. Aucun d’eux n’a voulu que je facture des honoraires lorsque j’ai démantelé le fonds.
Dans toutes les entreprises que j’ai créées – même celles qui ont fait faillite – j’ai toujours conservé de bonnes relations avec les investisseurs. Sauf cette fois-ci. Aucune de mes relations n’y a survécu, même si j’ai fait gagner de l’argent à tout le monde.
Quand les choses sont déroutantes, quand vous ne parvenez pas à comprendre comment ou pourquoi, ou si oui ou non, vous devriez gagner de l’argent, il est temps de se concentrer sur autre chose. En 1998, à l’époque où les lycéens ont appris à concevoir des sites Internet, j’ai revendu ma société spécialisée dans la création de sites pour 15 M$. Deux ans plus tard, pratiquement toutes les entreprises de ce secteur avaient mis la clé sous la porte.
Bref, en 2006, j’avais beau y réfléchir sous tous les angles, on aurait dit que l’économie mondiale était devenue dingue. Il fallait que je fasse quelque chose ou bien j’allais rapidement être fauché. J’ai fermé le fonds, en quelque sorte, sans réfléchir aux conséquences et, ensuite, je me suis rendu compte que j’allais être fauché. Une fois de plus.
Voici exactement ce que j’ai fait, à l’époque.
J’ai ébauché un site que j’avais envie de réaliser : un site financier qui ne diffusait pas d’informations mais se concentrait sur la création d’une communauté en échangeant des idées. Lorsque je dis « ébauché », cela veut dire que j’ai défini les fonctions de tous les boutons de la page d’accueil ainsi que les autres contenus qui y apparaîtraient. J’ai entièrement défini les cinq niveaux suivants du site, ainsi que les boutons, actions et contenus qui apparaîtraient sur chaque page.
Une fois ces spécifications définies, je me suis adressé à une entreprise basée en Inde pour qu’elle conçoive les cinq pages du site. Uniquement le design. Pas le code. Cela m’a coûté 500 $. J’ai montré ces pages à un partenaire potentiel (TheStreet.com) et j’ai négocié un accord selon lequel il m’aiderait à générer du trafic et diffuserait de la publicité en échange d’une participation de 50%. Leur site affichait un milliard de vues par an, alors j’ai dit oui. (En fait, ce n’est pas tout à fait vrai. Je leur ai proposé une participation de 3% et ils ont dit : « Non, 50%. » Alors j’ai dit oui.)
J’ai payé l’entreprise indienne 2 000 $ pour qu’elle termine le site. Ensuite, j’ai trouvé d’autres idées, pour le site, et après un premier lancement sur la base de la version 1.0, nous avons définitivement lancé la version 5.0 cinq mois plus tard.
J’ai poussé mes amis à utiliser ce site. Pendant un moment, j’ai créé plus de 700 faux utilisateurs et saisi manuellement plus de 10 000 données, peut-être, sur ce site, uniquement pour qu’il soit utile tout de suite. J’en ai tiré une leçon importante que je vous transmets : n’ayez pas peur de faire les choses par vous-même pour faire avancer votre site. Même avec du contenu généré par les utilisateurs, ce n’est pas un problème que vous soyez le premier millième utilisateur si vous pensez qu’un million d’utilisateurs vont en bénéficier.
J’ai demandé à des amis de rédiger des commentaires à propos du site sur leurs blogs, qui étaient très populaires. J’ai écrit des articles qui renvoyaient vers les contenus utiles du site. J’ai écrit sur beaucoup d’autres blogs, en tant qu’invité. C’est comme ça que l’on fait venir les utilisateurs sur un site. C’est vrai pour n’importe quel site : les sites financiers, d’ornithologie, d’amaigrissement, de sport, etc.
Sur le site, j’ai créé trois zones réservées à la communauté : l’une permettant aux gens d’échanger des messages et d’avoir des « amis » ; un forum généré par les utilisateurs ; et un système de question/réponse. Le système de question/réponse, en particulier, a généré 40% de trafic le lendemain du lancement. À ce stade, j’avais des publicités sur chaque page, un million d’utilisateurs par mois… Et aucun salarié. Alors la société a été rentable. En quatre mois, environ, nous avons gagné 100 000 $. Comme j’ai eu peur de transformer cela en grande entreprise, j’ai vendu le site aussitôt, quasiment.
Je pourrais citer d’autres exemples : la société de carte de paiement que j’ai créée ; le service de livraison que j’ai lancé ; l’hôpital psychiatrique auquel je me suis intéressé ; la société dont je suis membre du conseil d’administration et qui génère des milliards de revenus ; et les nombreuses entreprises que j’ai conseillées ou dans lesquelles je suis intervenu en tant que consultant et dans lesquelles j’ai investi. Mais les leçons retirées ont toujours été les mêmes : vous devez faire certaines choses, avant de créer une société, quel que soit son type.
Retroussez-vous les manches et activez l’huile de coude
Même lorsque quelque chose est évolutif, n’ayez pas peur de vous retrousser les manches et d’être la première étape de cette évolution. N’espérez pas que des utilisateurs anonymes ou des ordinateurs accomplissent tout le dur labeur initial à votre place. Personne ne se soucie autant de ce projet que vous. Alors c’est à vous d’accomplir tout ce dur labeur initial.
Offrez des contenus gratuits sur votre page d’accueil
J’avais tellement de contenus gratuits à offrir que cela noyait presque le design du site. Mais je n’étais pas graphiste. Mon premier souci était d’offrir aux gens autant d’informations de qualité que possible, et le plus vite possible, pour qu’ils s’inscrivent sur le site afin d’avoir accès aux fonctionnalités plus avancées. Après avoir récupéré une adresse e-mail, je pouvais vendre d’autres opportunités encore. Donnez autant d’éléments gratuits que possible pour obtenir cette adresse e-mail.
Externalisez peu à peu
D’abord, nous avons conçu les pages, puis, lorsque nous avons su que nous allions avoir une très grande diffusion, nous avons réalisé le reste du site. Ensuite, en fonction des retours des utilisateurs et d’autres idées, nous avons conçu quatre versions supplémentaires avant le lancement officiel. Le site a changé de façon spectaculaire, entre la version 1.0 et la version 5.0. Vous économisez énormément de temps et d’argent, lorsque vous pouvez apprendre sur le tas et utiliser ce que vous savez pour prendre de meilleures décisions concernant le développement de votre entreprise. Vous vous souvenez de ce que j’ai dit, concernant les listes de choses à faire ? Elles ne fonctionnent jamais car vous ne savez pas vraiment ce qui va se passer, lorsque vous démarrez un projet. Il en est de même pour une entreprise.
Diversifiez votre distribution
Bien que ma première source de distribution (TheStreet.com) m’ait rapporté du trafic, j’ai également conclu des accords avec AOL, Yahoo!, Forbes, Reuters, pour récupérer du trafic et des publicités de base. J’ai également publié des articles sur ces sites, avec des liens renvoyant vers mon site.
Au bout du compte, j’ai récupéré du trafic provenant de 20 sites différents. Ne laissez jamais une seule entreprise décider de votre sort. Des milliers d’entreprises ont disparu à cause de cette erreur.
Ne passez pas votre temps à vous inquiéter de la concurrence
Par exemple, j’avais des concurrents mais ils appliquaient la technique du « créez d’abord, ils viendront après ». 95% des entreprises oublient qu’il est important que vous soyez le premier gros utilisateur de vos produits (ce qui nous ramène au premier point que j’ai souligné). Je vais être honnête : lorsque je me suis rendu compte que j’avais des concurrents, au début, j’ai fondu en larmes. En fait, j’ai appelé les développeurs, en Inde, et je leur ai dit que c’était fini. Ils ont dû me remonter le moral. J’ai découvert que la passion que moi et mes partenaires partagions pour l’entreprise était son plus grand atout. Cette passion était bien plus importante que celle de nos concurrents, alors nous avons fini par créer et mettre en oeuvre les meilleures idées. Fin de la concurrence.
Un restaurant est un très bon exemple. Son succès initial ne dépend pas seulement de la saveur des plats, mais du nombre d’amis, et d’amis des amis, qui viennent s’y restaurer. N’ayez pas peur d’appeler tous vos contacts, pour qu’ils viennent goûter vos plats.
Connaître du monde importe peu
J’étais dans ce cas. J’ai contacté Yahoo!, AOL et Forbes pour me faire connaître. En fait, j’avais un « réseau négatif ». Le premier type que j’ai appelé, chez Yahoo, m’a dit qu’il me connaissait. « Ah bon ? » ai-je répondu, car je ne le connaissais pas du tout.
Il m’a dit : « Ouais. J’ai investi dans votre société d’Internet sans fil et j’ai perdu l’argent de mon investissement. »
On pourrait croire que cela n’allait pas m’aider. Pourtant, Yahoo! est devenu l’une de mes plus grandes sources de distribution, après cet appel. Et ce type est devenu mon plus fervent défenseur au sein de Yahoo!. La clé, c’est d’anticiper ce que les gens que vous ciblez peuvent bien vouloir, leur montrer que cela ne leur coûtera rien mais qu’ils en retireront d’énormes avantages, puis le faire, tout simplement. Facilitez les choses le plus possible pour que l’autre partie dise oui, avant de lui demander quoi que ce soit. Si vous voulez que quelqu’un dise oui, montrez-lui exactement à quoi ressemble ce « oui », et montrez-lui qu’il est déjà réalisé.
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