Par Philippe Combes**
Peut-être vous êtes-vous déjà interrogé quant à la possibilité de créer une entreprise. Peut-être même vous êtes-vous posé des questions du type « En suis-je capable ? Est-ce le bon moment ? Quelle activité ou quel secteur choisir ? ».
550 794 nouvelles entreprises sont nées en 2014. Soit 2% de plus qu’en 2013.
J’aurais pu vous parler de ces créations en vous offrant la nouvelle « to do list » du parfait créateur d’entreprise. Mais, d’une part, bon nombre de personnes se sont déjà essayées à cet exercice et, d’autre part, je n’en ai pas le désir. Et justement le désir est un levier important dans la création. Je dirais même qu’il est essentiel.
Pour créer votre entreprise, vous aurez assurément besoin de faire des recherches, d’accumuler les projets et les idées, de vous lancer dans des démarches. Pour autant, officialiser la naissance administrative de votre structure ne prend pas plus de deux jours. Ecrire des statuts à partir d’un modèle, les déposer à la préfecture, ouvrir un compte en banque et remplir quelques formulaires au Centre de Formalités des Entreprises ne sont quand même pas des exercices insurmontables. Je formule même l’hypothèse, cher lecteur, que vous avez déjà réussi des choses bien plus complexes.
Pourquoi la création est-elle un véritable exercice mental ?
Peut-être parce que, lorsqu’on réfléchit à se lancer, quand on commence à échanger et à prendre des conseils, on accumule rapidement, sans le savoir, les craintes et doutes des personnes en face de nous.
Même avec les meilleures intentions, les conseils « bien avisés » des spécialistes et proches ont bien souvent pour effet de nous nourrir d’injonctions ou de peurs — « ton conjoint est au courant », « avez-vous déjà bien étudié l’offre sur le secteur ? », « ah, c’est courageux, mais tu crois que c’est le bon moment ? »… Cumulées avec celles que nous possédons déjà dans notre for intérieur, ces remarques se transforment souvent en une bonne chape de béton qui verrouille et cristallise notre motivation, et peut même nous empêcher de nous lancer.
Pour ma part je viens de fêter les 10 ans de mon entreprise. Pendant ces années je me suis tantôt délecté, tantôt hérissé d’entendre des « ce n’est pas le moment de lancer ce projet, ça marche pourtant bien pour toi !? » ou des « vous êtes jeune quand même ! », ou le classique « on ne peut pas vous financer, vous comprenez, vous êtes sur un marché déjà saturé et nous n’avons aucune garantie que vous réussirez ». J’ai aussi entendu au moins une bonne centaine de clients que j’accompagnais dire ou reporter que « ce n’est pas possible » ou que « l’on a toujours fait comme cela ».
« Ce n’est pas parce que les choses sont difficiles que nous n’osons pas, c’est parce que nous n’osons pas qu’elles sont difficiles.«
Sénèque
Je le répète, si la création d’entreprise n’est pas un parcours sans difficulté, elle n’est pour autant pas plus complexe que la plupart des fonctions exercées par un cadre dans une entreprise ou une administration. Ce qui la rend difficile, c’est bien plus l’idée que l’on s’en fait que sa réalisation en tant que telle.
Derrière la peur il y a le désir
La stimulation et le plaisir de construire son projet grandissent à partir du moment où on entre dans l’action et on s’autorise à regarder en quoi cela répond à sa propre réalisation d’être humain.
En quoi ce projet peut avoir du sens dans ce qui est important pour vous ?
Que peut-il apporter dans ce que vous aimez faire, apporter et construire dans ce monde ; dans la mission et l’ambition que vous pourriez vous définir lors de ce bref passage sur terre ?
Eh oui, nous ne sommes pas que des êtres raisonnables et cartésiens qui cherchent à contrôler leur vie et leur environnement. Si nous l’étions, nous habiterions encore dans des grottes. Créer, c’est prendre un risque. Celui de ne pas se laisser dominer par sa peur et par les difficultés. Celui de faire le pari qu’il y aura (aussi) de la lumière, des réussites et de la jubilation à la sortie de la grotte.
« Les humains ne s’adaptent pas à la réalité, mais au monde qu’ils se sont construit. »
Andreu Solé
La réalité, c’est donc ce que vous décidez de construire, non seulement d’un point de vue professionnel mais aussi personnel. La réalité du créateur d’entreprise se constituera avant tout par l’écoute que vous vous porterez.
Vous devez examiner attentivement le sens et la place que peut prendre cette entreprise dans votre vie. En prenant en compte comment cette création répondra à un désir qui grandit en vous, vous pourrez insérer cette nouvelle expérience dans un parcours passé, vous nourrir de vos expériences et connaissances pour construire et créer.
J’ai passé six années en entreprise et je me souviens de cet ancien collègue me révélant qu’il m’avait surnommé, sans que je ne le sache, le « rouleau compresseur ». Je comprends maintenant combien je n’étais pas à l’écoute de moi-même, de ma fatigue, de mes aspirations et souhaits profonds.
Aujourd’hui, je transpose la logique du sportif au service de mon rôle de dirigeant et d’accompagnant. Ce qui prime ce n’est ainsi pas (ou plus) « comment en faire le plus possible » mais « comment être parfaitement prêt pour la prochaine échéance prioritaire ». Cela me conduit alors à en faire moins, à me mettre en condition, à prendre du temps pour me poser des questions sur mes intentions. C’est tout autant un équilibre professionnel que personnel pour moi.
Créer c’est finalement s’engager dans une nouvelle forme d’apprentissage sur soi, pour soi et dans l’interaction avec les autres. Se lancer dans le grand bain de la création, c’est développer de nouvelles connaissances, des savoir-faire et des avoir être.
La création d’entreprise ne se résumera jamais à un business plan ou aux 33 conseils de dirigeants qui sont déjà passés par cet exercice. Créer, développer et gérer, c’est avant tout une aventure personnelle, un chemin d’initiation.
Regardons alors notre peur et notre vulnérabilité comme une bonne nouvelle ! Oui, vraiment, je suis inquiet quand je rencontre un créateur d’entreprise qui n’a pas peur.
Ecouter son désir et apprivoiser sa peur de créer une entreprise, c’est finalement s’engager à cultiver l’estime de soi.
Serait-ce un bon mantra pour se lever le matin ?
** Philippe Combes est titulaire d’un DEA en Management des organisations (IAE de Paris & HEC Paris) et d’un DESCAF réalisé à l’EM Normandie (HEC entrepreneurs). Coach certifié HEC Executive & Praticien certifié Elément Humain il est formé à la Communication Non Violente, à l’Analyse Transactionnelle et à l’Approche Systémique de Palo Alto.
Pour ceux qui souhaitent aller plus loin, Philippe organise un Atelier découverte, gratuit et ouvert à tous, le mardi 22 septembre de 18h30 à 21h30 à l’Institut 51ter à Montreuil. Vous pourrez vous essayer à ce modèle systémique pour développer votre détermination, communiquer avec plus d’influence et faciliter vos relations.
Pour réserver, envoyez un e-mail avec vos noms et coordonnées à contact@51ter.fr