Andrew Lockley, rédacteur pour Exponential Investor
Face au risque que représentent les bactéries résistantes aux antibiotiques, les bactériophages (dits phages) sont une des solutions possibles, mais se heurtent encore à la prudence des autorités réglementaires.
Les sociétés pharmaceutiques n’en sont qu’au début
Comme je vous le disais vendredi, une clinique détient peut-être la meilleure approche pour cette technologie.
Le Phage Therapy Center, assez peu connu et situé à Tbilisi en Géorgie, est l’un des leaders dans le domaine. Des patients désespérés, qui souffrent d’infections incurables ailleurs, traversent parfois le monde pour y être traités.
Pour qui s’intéresse aux phages, la biotech française Pherecydes Pharma est un choix nettement plus conventionnel, car elle est soutenue par les institutions.
Elle développe un portefeuille de traitements pour les infections de la peau, des os et des voies respiratoires, mais, ils sont tous à des années d’une éventuelle mise sur le marché. Avant cela, Pherecydes Pharma devra mener à bien des essais cliniques compliqués et coûteux.
La biotech américaine AmpliPhi Biosciences (APHB-OTC) travaille elle aussi sur les phages. Tout comme Pherecydes Pharma, elle n’en est encore qu’aux essais cliniques, mais elle est déjà cotée en Bourse, donc facile à surveiller.
Vous pouvez aussi garder un œil sur la société américano-indienne Gangagen Biotechnologies qui développe, entre autres, des traitements à base de bactériophages.
Des antibiotiques issus des bactéries
Vous vous demandez peut-être aussi pourquoi nous ne développons pas simplement de nouveaux antibiotiques.
Encore une fois, le système capitaliste n’a pas pleinement fonctionné dans ce cas. (NB : Je ne suis vraiment pas un fan de Jeremy Corbyn, mais il faut parfois voir la réalité en face.)
La meilleure manière de gagner de l’argent, pour une entreprise pharmaceutique, est de vendre des pilules que vous devrez prendre indéfiniment. Par exemple, pour des maladies chroniques comme l’hypertension.
Développer un traitement antibiotique à prendre pendant cinq jours n’est pas vraiment un investissement attractif pour les actionnaires. C’est l’une des raisons pour lesquelles il n’y avait, en 2013, que sept nouveaux antibiotiques potentiels au stade des essais sur l’humain…
Paradoxalement, c’est ce qui nous mène à notre occasion d’investissement la plus prometteuse. Car, les bactéries sont elles-mêmes sources de nombreux antibiotiques potentiels.
En effet, une bactérie n’aime pas du tout partager son territoire avec une » bande » rivale. Elle n’hésite pas à jouer les nettoyeurs pour s’en débarrasser.
Ceci dit, l’un des problèmes clé avec les recherches sur de nouveaux antibiotiques est que les bactéries sont des créatures très sensibles. Trouver des espèces potentiellement sources d’antibiotiques est plutôt facile. Mais, les bactéries sont sauvages et n’aiment pas grandir en laboratoire.
Seul 1 % des bactéries peut être cultivé en laboratoire. Imaginez un zoo où 99 % des espèces mourraient immédiatement. Il y a fort à parier que vous n’y emmèneriez pas vos enfants bien souvent. Eh bien, après plus de 150 ans passés à cultiver des bactéries, nous ne sommes pas capables de faire mieux. Incroyable, mais vrai.
Il existe une entreprise dotée d’une technologie secrète, qui est capable de pousser les bactéries à produire des antibiotiques, même quand il n’est pas possible de les cultiver de manière traditionnelle.
La biotech américaine NovoBiotic Pharmaceuticals a développé un produit innovant pour cultiver les microbes : l’iChip (dont ils ont obtenu la licence auprès de l’université à l’origine de l’entreprise).
Il s’agit, pour faire simple, d’un type particulier de » papier-tissu « , une membrane très fine qui permet de piéger les bactéries. Il est assez aisé d’isoler les bactéries souhaitées, mais très difficile de leur offrir le bon environnement pour se reproduire, donc l’entreprise ne s’y essaye même pas. Au lieu de cela, elle place les bactéries dans le milieu dans lequel elles vivent naturellement et permet aux produits chimiques qu’elles connaissent de traverser la membrane.
Les microbes obtiennent ainsi précisément ce dont ils ont besoin, mais ne peuvent pas s’échapper. Ce n’est pas vraiment une méthode fonctionnelle de production d’antibiotiques, loin de là, mais c’est un excellent point de départ pour identifier des composés prometteurs et des bactéries capables de les produire.
L’entreprise a déjà été en mesure d’isoler une catégorie entièrement nouvelle d’antibiotiques, la teixobactine. Un véritable événement pour la recherche. De nombreux autres pourraient suivre, ce qui rend cette biotech très attractive.
Comme je l’ai déjà dit, investir dans ce genre de technologie est un pari très risqué. Elles ne sont pas encore capables d’éviter à elles seules l’apocalypse bactérienne qui nous menace. Mais pour l’instant, elles sont notre seule chance. Peut-être est-il temps d’oser ?
[NDLR : Et n’oubliez pas que Ray Blanco vous propose une biotech spécialisée dans les antibiotiques et qui s’apprête à lancer de nouveaux traitements sur le marché. A découvrir dans NewTech Insider]