En psychologie, rien n’est définitivement acquis. Les nouvelles psychothérapies ont le vent en poupe, mais de quoi parle-t-on au juste ? Je vais vous éclairer sur la multiplicité des écoles, des statuts et des possibilités qui s’offrent à vous.
Un peu d’histoire
Dans les années 1980, on faisait état de centaines de psychothérapies regroupables en une dizaine de familles. Je vous épargnerai une liste qui ne pourrait être exhaustive. Dans ce flou artistique, les TCC (thérapies cognitivo-comportementales), venues des États-Unis, avaient déjà leur place. C’est depuis quelques années que l’on assiste à un véritable déferlement de ces méthodes qui, à défaut de toujours éradiquer les symptômes, entendent changer le regard que vous avez sur eux.
C’est bien sur ce point que ces nouvelles thérapies se distinguent des précédentes : les TCC prétendent moins vous soigner que vous conduire vers une certaine acceptation et donc une certaine gestion sereine de votre souffrance psychique.
Dans cette route vers la « sagesse », tout y passe : l’hypnose, l’EMDR (1), la psychologie positive… Le nombre de thérapeutes se formant à diverses techniques augmente.
Dans l’histoire de la psychologie clinique, les courants dits comportementalistes (visant d’abord à intervenir sur le comportement) et cognitifs (cherchant à intervenir sur les croyances, les représentations et leurs processus de construction) sont apparus parallèlement au milieu du XXe siècle, et ont parfois été en compétition. Depuis les années 1980, ce clivage historique entre comportementalisme et cognitivisme tend à disparaître dans la pratique thérapeutique.
On ne prêche plus pour une paroisse, on ne place plus une technique thérapeutique au-dessus des autres, mais on expérimente une approche thérapeutique multiple.
La vague de TCC
« Les TCC, thérapies cognitivo-comportementales (ou psychothérapies cognitivo-comportementales), ont pour particularité de s’attaquer aux difficultés du patient dans ʺl’ici et maintenantʺ par des exercices pratiques centrés sur les symptômes observables au travers du comportement et par l’accompagnement par le thérapeute qui vise à intervenir sur les processus mentaux dits aussi processus cognitifs, conscients ou non, considérés comme à l’origine des émotions et de leurs désordres » (Wikipédia).
Les thérapies de 3e vague comportent plusieurs formes. Parmi les plus connues, on retrouve :
- la thérapie cognitive fondée sur la pleine conscience dont MBSR (mindfulness based stress reduction) et MBCT (mindfulness based cognitive therapy) ;
- l’ACT (thérapie de l’acceptation et de l’engagement).
Le spectre des indications des TTC est très large :
- les troubles anxieux en général et leurs diverses manifestations psychiques ou physiques ;
- les phobies simples et sociales : l’agoraphobie ou la claustrophobie, les attaques de panique, le trac, les troubles obsessionnels compulsifs ;
- toutes les affections liées au stress, y compris les affections psychosomatiques ;
- la boulimie, les troubles sexuels et les problèmes de couple.
En pratique, les séances durent 45 à 60 minutes. Elles se répètent toutes les semaines pendant une dizaine de mois. Elles coûtent entre 30 et 150 euros selon la qualification du thérapeute.
Avec ces nouvelles psychiatries venues des États-Unis, on traite un symptôme et pas une personne. Trois personnes ont peur de l’eau, on fera la même thérapie courte pour les trois ou le même traitement médicamenteux pour éradiquer le symptôme, alors qu’auparavant on s’attachait à se demander d’où venait ce symptôme.
A quel thérapeute se vouer ?
Avant toute chose, sachez que le statut de psychothérapeute est légalement ouvert aux médecins, aux psychiatres, aux psychologues, aux psychanalystes, moyennant une courte formation suivant le parcours du praticien. La loi votée le 30 juillet 2004 prévoit que, pour porter le titre de psychothérapeute, il faut s’inscrire à un registre national. Plus important, la loi définit les formations permettant d’accéder à ce titre.
Cela reste facile de contourner la loi : c’est juste une question de vocabulaire. « Thérapeute psychique » ou « thérapeute professionnel » : n’importe qui peut se déclarer en tant que tel et avoir pignon sur rue… Les vocables ne manquent pas : tous ces « psychopraticiens » ne sont que trop peu formés aux yeux de la loi.
Quant à la psychothérapie, elle n’est pas définie légalement, le terme laisse le champ libre à toutes sortes de pratiques.
Les nouvelles psychothérapies font l’objet d’un certain nombre de critiques, notamment en termes de scientisme, de normalisation et de standardisation, là où chaque être humain est unique. Pour ses détracteurs, les TCC sont inadéquates à répondre aux causes des souffrances psychiques. Ils avancent plusieurs arguments :
- des critères de réussite standardisés : ces thérapies ne visent que les symptômes pris « au pied de la lettre ». En ce sens, le symptôme peut être supprimé sur un objectif précis, en apparence. Mais il se peut que ses causes soient encore présentes ou qu’il se soit déplacé ;
- l’absence d’appréhension du patient comme sujet singulier, individu unique. S’attachant à suivre des protocoles standardisés, elles évacuent la « dimension humaine du patient », ce qui est le propre de l’approche psychanalytique, en tant qu’il est sujet de l’inconscient, sans appréhension de la singularité de chaque individu. Dès lors, les TCC seraient en fait une normalisation du sujet aux standards sociaux en vigueur.
Une évaluation très problématique
Le dénominateur commun de toutes ces méthodes est la qualité de la relation thérapeutique : si vous ne vous sentez pas à l’aise avec votre interlocuteur, inutile de poursuivre très longtemps. Changez de personne.
Une autre chose essentielle avant même d’entamer une prise en charge thérapeutique, c’est l’assurance :
- de votre désir de changement ;
- de votre motivation ;
- de l’accroissement de l’estime de soi.
L’indication d’une thérapie est souvent intuitive et biaisée par les partis pris du thérapeute, sa formation et ses dogmes. A en croire la « tendance » actuelle, toutes les méthodes se vaudraient et pourraient être employées par n’importe quel « thérapeute » au gré de ses envies, au lieu de les adapter avec rigueur aux besoins réels des patients.
Gare aux abus !
Je finirai par vous mettre en garde contre les dérives sectaires très présentes dans le domaine du « mieux être ». L’essor considérable des psychothérapies ne peut que conduire à s’interroger sans cesse sur leur légitimité et leur efficacité.
Un diplôme ou une reconnaissance officielle ne fait pas tout ! Si cela permet de certifier un certain sérieux, vous n’êtes pas à l’abri d’une personne malveillante… voire parfois d’une secte. Elles recruteraient aujourd’hui sous couvert de psychothérapies et autres stages de développement personnel. Comment être sûr de ne pas tomber dans les griffes d’un gourou, ou plus simplement d’un charlatan ? Dans son livre Bien choisir son psy, Anne-Sophie Nogaret donne quelques clés pour reconnaître un « vrai psy » :
- il ne donne pas de conseils ;
- il n’intervient pas dans votre vie privée ;
- il ne vous impose pas de règles de vie ;
- il ne vous rencontre pas en dehors de son cabinet ;
- il ne tente pas de vous faire partager ses croyances ;
- il vous fait payer un prix raisonnable.
Il est essentiel de choisir un professionnel sérieux et de ne pas tomber sur un gourou ou même simplement un dilettante. Restez prudent et discutez avec votre médecin traitant habituel à qui vous faites confiance. Il sera à même de vous orienter vers des praticiens dignes de ce nom.
Il n’y a pas de remède miracle…
… mais quelques solutions qui, pratiquées par des psychothérapeutes formés et reconnus par leurs pairs, peuvent aider à faire face aux aléas de la vie. Difficile de dire qu’une thérapie est mieux qu’une autre.
Les thérapies intégratives ou multi-référentielles connaissent un grand engouement dans les pays anglo-saxons : elles se construisent en associant des éléments de différents courants. N’hésitez pas à consulter le site de la Fédération française de psychothérapie et psychanalyse.
Un autre courant prend de l’ampleur : le courant humaniste qui cherche à se démarquer de la psychanalyse et des TCC en réaffirmant que l’homme est le seul maître de son destin. Il remet en question l’idée d’un sujet conditionné par son environnement. Environ la moitié des psychothérapies pratiquées en Europe seraient de ce type.
Je citerai enfin l’ACP (approche centrée sur la personne), qui considère que la personne elle-même sait le mieux comment sortir d’une impasse. Vous devenez « acteur » de votre thérapie. Vous déterminez vers où vous voulez aller. Le thérapeute est là pour vous aider à vous recentrer sur vos objectifs et à vous libérer des contraintes extérieures qui vous empêchent de les atteindre.
C’est à vous d’agir : prenez soin de vous !
(1) EMDR : ce sigle signifie « eye movement desensitization and reprocessing« , c’est-à-dire reprogrammation et désensibilisation par le mouvement de l’œil. La « nouvelle hypnose », pratique popularisée en France par le psychiatre David Servan-Schreiber dans son bestseller Guérir, est une sorte d’hypnose revue et corrigée. Par des mouvements oculaires, on « reprogramme » le cerveau pour effacer les traumatismes.