La pandémie a exacerbé un problème mondial de santé publique : la dépression chronique. La psilocybine, nouveau type de traitement quelque peu controversé, pourrait changer la donne.
Ce n’est pas un secret : avec la pandémie de COVID-19, le nombre de personnes souffrant de troubles mentaux a augmenté.
Selon les Centres de contrôle et de prévention des maladies, aux États-Unis, près de 31% des personnes interrogées ont reconnu souffrir d’angoisse ou de troubles dépressifs provoqués par la pandémie de COVID.
Vu les actualisations quotidiennes des cas de contamination et de décès, comment ne pas être déprimé ?
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Avant le COVID, la dépression était déjà un énorme problème, aux États-Unis (et partout dans le monde). Avant le COVID, selon Statista, 7,40% des adultes luttaient contre une forme de dépression ou une autre, avec des taux plus élevés chez les femmes que chez les hommes.
Ces statistiques sont frappantes. Si l’on décompose les chiffres pour ne faire ressortir que les adultes âgés de 26 à 49 ans, près de 9% ont souffert d’un épisode dépressif majeur (« EDM ») en 2019.
En ce qui concerne les traitements reçus pour épisode dépressif majeur, près de 12 millions d’adultes américains ont été traités d’une façon ou d’une autre par un médecin en 2019.
Les traitements actuels de la dépression chronique
Sans trop entrer dans les détails, la Mayo Clinic, une fédération hospitalo-universitaire et de recherche américaine, définit la dépression comme un trouble de l’humeur qui déclenche un sentiment persistent de tristesse et de perte d’intérêt.
Et la dépression clinique (ou caractérisée) affecte votre façon de ressentir, de réfléchir et de vous comporter.
Actuellement, le protocole appliqué à la dépression clinique consiste à prescrire des ISRS, inhibiteurs sélectifs de la recapture de la sérotonine. Je suis sûr que vous avez déjà entendu parler des Lexapro, Prozac, et Zoloft : ce sont tous des ISRS communément prescrits.
Et même si ces traitements viennent en aide à une partie de la population souffrant de dépression, plus de la moitié des gens qui en prennent ne sont jamais soulagés.
Sciencedaily.com offre cette explication, concernant le manque d’efficacité des antidépresseurs :
La cause de la dépression a été trop simplifiée, et les médicaments destinés à la traiter ne visent pas la bonne cible. Les médicaments sont comme des flèches frappant la périphérie de la cible au lieu d’attaquer son centre.
Si l’on observe les statistiques datant d’avant la pandémie, il y avait déjà clairement une énorme demande non satisfaite, en termes de traitements efficaces de la dépression clinique.
La clé ne se trouve pas dans de nouvelles pilules ou un cocktail créatif de médicaments…
Des premiers essais utilisant des psychédéliques sont approuvés par la FDA
Voyez-vous, un nombre croissant de professionnels de la médecine croit que la voie permettant de soulager durablement ceux qui souffrent de dépression passe par un médicament tombé en disgrâce en 1970, période où Richard Nixon a promulgué cette loi : le Controlled Substance Act (« CSA »).
Je parle des psychédéliques, plus spécifiquement de la psilocybine.
Avant de répliquer que la FDA ne soutiendra jamais cette idée, vous devez savoir qu’en 2018, elle a accordé le statut de thérapie innovante (« breakthrough therapy« ) à COMPASS Pathways pour son utilisation de la psilocybine dans l’indication de la dépression résistant au traitement (« DRT »).
En 2019, la FDA a également accordé ce statut à Usona Institute pour une évaluation de Phase II de la psilocybine dans le traitement de la dépression clinique.
Même si les psychédéliques ont été utilisés tout au long de l’histoire pour traiter diverses affections, ces médicaments sont tombés en disgrâce lorsqu’ils ont été intégrés à la liste des substances contrôlées, en 1970.
Mais grâce à la décision de la FDA d’accorder le statut de thérapie innovante à des essais employant ces composés, la médecine conventionnelle adopte rapidement un état d’esprit selon lequel la psilocybine et les psychédéliques pourraient représenter un nouvel espoir de taille, pour ceux qui souffrent de dépression.
Les faits purs et durs issus d’études autour de la psilocybine
Les professionnels de la médecine, les investisseurs et le grand-public qui n’investit pas, tous ont des a priori qui leur sont propres.
Et aux États-Unis, comme beaucoup d’entre eux ont grandi à l’ère du programme éducatif DARE (« Drug Abuse Resistance Education« ) et de la guerre contre la drogue, j’imagine qu’ils ont un mouvement de recul, en songeant au potentiel thérapeutique de drogues telles que la psilocybine.
Je ne crois pas un instant que tout le monde va allègrement s’embarquer dans les psychédéliques et adopter ce type de thérapie.
Mais considérez ce qui suit…
Selon une étude publiée début novembre 2020 dans la revue médicale Journal of the American Medical Association (JAMA) :
71% des gens ayant pris de la psilocybine pour traiter une dépression clinique ont constaté une diminution de plus de 50% des symptômes au bout de quatre semaines, et la moitié des participants sont entrés en rémission.
Cette étude de novembre 2020, publiée sur le JAMA Network, indique que même si les antidépresseurs sont énormément prescrits, certains éléments tangibles suggèrent que les médicaments semblables à la kétamine peuvent également être utilisés. Malheureusement, lorsqu’elle est efficace, une seule infusion de kétamine ne dure que quelques jours, voire trois semaines. Pire encore, il existe un risque élevé d’abus.
Mais regardez ce qu’indique l’étude JAMA en ce qui concerne la psilocybine (les caractères gras ont été ajoutés) :
L’action combinante sérotoninergique et glutamatergique de la psilocybine, ainsi que les premières preuves des effets antidépresseurs d’un traitement assisté par psilocybine, signalent qu’un traitement assisté par psilocybine pourrait être une nouvelle forme d’intervention antidépressive. De plus, la psilocybine présente un risque d’addiction et des effets toxiques moins élevés que la kétamine et n’est pas associée, en général, à un dysfonctionnement perceptif, cognitif ou neurologique à long terme.
L’étude JAMA indique également que « les pharmacothérapies actuelles dans le traitement de la dépression ont une efficacité et des effets indésirables variables ».
Ce qu’il y a de bien avec les essais cliniques, c’est qu’ils nous offrent des fait purs et durs, et non des opinions.
Même si nous savons depuis des années que la capacité des antidépresseurs est limitée pour traiter la dépression d’un grand nombre de personnes qui en souffrent, des éléments scientifiques sont en train d’être réunis afin de démontrer que des psychédéliques – tels que la psilocybine – pourraient représenter un nouvel espoir considérable pour des millions de gens souffrant de dépression.
Pas de plaidoyer pour l’usage récréatif
Depuis des années, les partisans du cannabis affirment que ce n’est qu’une question de temps avant que les psychédéliques comme la psilocybine deviennent populaires et soient légalisés dans le cadre d’un usage récréatif.
Mais honnêtement, je n’ai aucune envie d’investir dans cette perspective. Et selon les recherches réalisées par mon équipe, la plupart des entreprises intégrant l’univers des psychédéliques ne souhaitent pas plaider en faveur du marché récréatif (du moins à court terme).
Voyez-vous, le marché du cannabis récréatif a beau être énorme, les psychédéliques sont un composé totalement différent.
Ils font « planer » beaucoup plus haut. La plupart des régulateurs, au niveau des États, ne sont pas favorables à la légalisation d’un usage récréatif concernant des composés tels que la psilocybine. Et la stigmatisation associée à l’usage récréatif des psychédéliques demeure très répandue.
Voilà pourquoi nous nous concentrons sur l’utilisation sur prescription médicale des psychédéliques, et la probabilité de plus en plus élevée que les composés tels que la psilocybine représentent un nouvel espoir de taille pour ceux qui souffrent de maladies mentales.
Si des sociétés intéressantes venaient à apparaître sur ce marché, je ne manquerai pas de vous en parler !