Je n’aime pas trop penser au futur, cela me rend nerveux. S’attarder sur des choses qu’on ne connaît pas avec certitude est le plus sûr moyen de se donner des brûlures d’estomac – du moins, c’est mon cas.
C’est pour cela que je n’aime pas vraiment faire des prédictions sur le futur. Il y a toujours une chance sur deux que je me trompe.
Mais qu’on le veuille ou non, le futur est la seule chose à laquelle ON PEUT penser. À moins de vouloir vivre dans le passé – auquel cas, on fait partie de ceux qui resteront à la traîne.
Il y a une chose que nous savons avec certitude à propos du futur : l’innovation n’est pas prête de s’arrêter. Le monde a des problèmes que des gens intelligents travaillent à résoudre. Et ils y arriveront, comme ils y sont toujours arrivés.
Ces innovations bouleverseront le monde.
Aujourd’hui, parlons de l’une des plus grandes innovations, de celles qui font les gros titres en ce moment : les voitures autonomes. Lorsque j’étais chez Google il y a quelques années, je suis entré par mégarde dans la salle où étaient mises au point ces voitures. La sécurité m’a escorté jusqu’à la sortie.
Google considère qu’une innovation ne vaut la peine que si elle peut résoudre un problème pour un milliard de personnes. UN MILLIARD ! Ce genre d’innovations fait plus que de résoudre un problème : elle impactera chaque facette du monde dans lequel nous vivons.
Voici, selon moi, les bouleversements qu’apportera la voiture sans conducteur.
Une innovation sources de changements dans de multiples domaines
Pour l’industrie automobile
On peut affirmer sans trop se tromper que d’ici vingt ans presque tous les véhicules seront autonomes, ce qui signifie que 90% de l’industrie automobile sera sans doute au chômage.
Certes, certains possèderont encore des voitures à l’ancienne ; la voiture est, pour beaucoup de gens, plus qu’un simple moyen de transport. Les ventes de voitures ne seront pas complètement réduites à zéro, même si beaucoup passeront aux voitures autonomes.
Toutefois, à chaque fois qu’un marché disparaît, un nouveau apparaît. Lorsque nous sommes passés du cheval à la voiture, ceux qui travaillaient dans le secteur équin sont passés à l’industrie automobile.
Comment sera alors la nouvelle industrie ? D’abord, le design des voitures changera. En outre, un besoin essentiel apparaîtra : celui de résoudre les problèmes qui vont inévitablement apparaître avec cette nouvelle technologie.
Pour les assurances
Le nombre d’accidents automobiles baissera dès que l’erreur humaine ne fera plus partie de l’équation – de nombreux experts estiment cette baisse à plus de 90%. Cela déroutera les compagnies d’assurance.
Ceci étant, aucune technologie n’est infaillible.
En février 2016, une voiture autonome de Google a provoqué son premier accident, après plus d’un million de kilomètres de tests sans incident (ou du moins sans incident provoqué par la voiture autonome). Certes, la voiture roulait à 2 à l’heure lorsqu’elle a heurté un bus, et il n’y a eu aucun blessé. Mais le premier accident mortel impliquant une voiture autonome eut finalement lieu en mars 2018, en Arizona : une piétonne avait été renversée par un VTC d’Uber en phase de test.
Qui est responsable lorsqu’il n’y a personne derrière le volant ? Et en cas de collision, les voitures autonomes seront-elles conçues pour protéger leur passager ou pour sauver le plus grand nombre de vies ? Il faudra répondre à ces questions et légiférer.
Début mars 2019, la procure du comté de Yavapai, en Arizona, a publié un rapport établissant que la responsabilité pénale d’Uber n’était pas engagée dans le cadre de l’accident de 2018, malgré un possible mauvais réglage des capteurs sur le véhicule, qui n’auraient pas correctement évalué le danger potentiel. Dans le cadre de cet accident, c’est surtout la conductrice qui risque d’être incriminée car l’enquête a établi qu’elle avait été « distraite », raison pour laquelle elle n’a pas repris le contrôle du véhicule suffisamment tôt.
En France, un décret de 2018 sur l’expérimentation des véhicules autonomes stipule ceci au sujet des conducteurs de ces voitures test :
Lors de l’activation des fonctions de délégation de conduite, le conducteur est à tout instant en capacité de prendre le contrôle du véhicule, notamment en cas d’urgence ou lorsque le véhicule sort des conditions d’utilisation définies pour l’expérimentation. […] Il doit alors être en mesure de prendre le contrôle du véhicule à tout instant.
Pour le secteur des services
Absolument tous les emplois qui nécessitent un chauffeur – livreurs de pizzas (Domino’s Pizza a d’ailleurs lancé des tests en partenariat avec Ford, depuis 2017, aux États-Unis), conducteurs de chasse-neige, chauffeurs de taxi, conducteurs de transports publics, camionneurs – évolueront. Pourquoi payer un employé pour quelque chose qu’une machine peut faire gratuitement ?
Pour les entreprises de dépannage
Un effet secondaire des changements dans l’industrie des transports : les entreprises qui répondent aux besoins des camionneurs ou qui se localisent de manière stratégique hors des autoroutes seront inévitablement impactées. On pense aux restaurants de bord de route ouverts 24/24h, aux relais routiers, aux motels.
Sans routiers roulant la nuit, sans voyageurs ayant besoin de s’arrêter, le marché de ces entreprises chutera rapidement.
Pour le maintien de l’ordre et action militaire
Les véhicules autonomes présentent un potentiel infini dans le secteur militaire : transporter les troupes, servir de leurre, trouver des mines sans risque de victimes, etc.
Concernant le maintien de l’ordre, la police pourra diriger son attention ailleurs que sur les infractions du code de la route et les conduites en état d’ivresse.
Ceci étant, on peut relever un effet secondaire intéressant : les amendes dues aux infractions au code de la route sont une importante source de revenus pour beaucoup de municipalités, or elles disparaîtront quasiment complètement lorsque les voitures autonomes seront majoritaires. Par quoi les municipalités remplaceront-elles cette source de financement ?
Pour la protection de la vie privée/des données
Notre désir d’utilisation des nouvelles technologies entre en contradiction avec notre désir de protéger notre vie privée. Or, par nécessité, les voitures autonomes seront entièrement dépendantes de la technologie GPS, et il y aura plus que jamais des données de localisation à disposition.
Par conséquent, les secteurs de la protection de la vie privée et de la sécurisation des données se développeront à mesure que les gens rechercheront de nouvelles façons d’avoir le meilleur des deux mondes.
Comment profiter de la tendance ?
Si vous n’êtes pas celui qui trouvera comment les assurances vont fonctionner ou comment diriger le marché en utilisant la technologie, pas de problème : il existe encore des manières pour vous de profiter de cette tendance. Le meilleur moyen est d’investir dans les entreprises qui vont résoudre ces problèmes.
Yann Boutaric écrivait au sujet d’Uber, le leader des VTC :
En octobre dernier, les banques d’affaires Goldman Sachs et Morgan Stanley – qui ont d’ores et déjà proposé leurs services pour la gestion de l’IPO – avaient avancé une valorisation ahurissante de 120 milliards de dollars.
Une fois cotée, cette plateforme continuera de croître et de se développer dans l’économie de la voiture autonome.
Existe-t-il d’autres entreprises qui les aide à développer des logiciels ou de nouveaux services ? Qui collabore avec Uber ? Surveillez ce type d’investissements indirects et gardez un œil sur les fournisseurs d’Uber.
Je vous conseille aussi de surveiller les concurrents d’Uber, comme par exemple Lyft, dont l’IPO n’a pas tenu entièrement ses promesses. C’était d’ailleurs le sujet de l’article de Yann de vendredi dernier.