Regardez autour de vous. La crise des marchés émergents de 2015 a fini par atteindre les côtes américaines et l’Europe.
Nous vivons notre deuxième ère de la mondialisation
La première ère a démarré en 1870 et s’est achevée en 1914, avec la Première Guerre mondiale. La deuxième ère de la mondialisation a débuté en 1989, avec la chute du Mur de Berlin, et elle dure toujours.
Tout comme la première ère, cette période a connu énormément d’innovations technologiques et une intégration économique et financière intense.
La grande inconnue est de savoir si cette deuxième ère de la mondialisation va elle aussi être anéantie par une catastrophe équivalente, du point de vue de sa force destructrice, à la Première Guerre mondiale. L’avenir nous le dira.
Mes systèmes d’analyse dynamique de la mondialisation (qui s’appuient sur la théorie de la complexité ainsi que sur des indicateurs et alertes) signalent qu’un effondrement n’est plus qu’une question de temps.
Seul le moment précis ainsi que l’élément déclencheur (flocon de neige qui déclenche l’avalanche) restent à découvrir.
Intégration et interconnexion intense
Au cours de la phase d’expansion et de croissance de cette deuxième ère de mondialisation, de 1989 à 2007, les commentateurs n’ont cessé de mettre l’accent sur la force de l’intégration et de l’interconnexion du monde économique et financier.
Les chaînes d’approvisionnement étaient tendues à bloc, que ce soient celles de Wal-Mart dans l’Etat de Géorgie, ou d’une usine située à Guangzhou (Canton). Les banques achetaient des obligations sur un marché, créaient des dérivés et des ETF sur un autre marché, pour les vendre sur un troisième marché. Depuis des dizaines d’années, on persiste à concentrer les actifs bancaires entre un minimum de mains, sans que la crise financière de 2007-2008 n’ait interrompu le process de concentration.
Tout le monde s’en est félicité, à l’époque : cela montrait à quel point le monde était devenu malin et performant. En fait, on reproduisait les mêmes conditions commerciales et financières ayant abouti à l’effondrement catastrophique de 1914…. On a comme une impression de déjà-vu.
Ne vous inquiétez pas Mme la marquise…
Jusqu’à très récemment encore, nombre d’analystes de Wall Street nous garantissaient que les problèmes de la Chine lui étaient propres, et qu’ils ne se propageraient pas à l’extérieur.
Ils nous ont déclaré que la croissance des Etats-Unis était solide, et que l’effondrement des marchés émergents en Russie, au Brésil, en Chine, en Turquie et ailleurs était dû à des facteurs et contextes nationaux qui n’affecteraient pas les Etats-Unis.
Erreur ! Comment un monde si étroitement lié en période d’expansion, ne serait-il plus corrélé en phase de contraction ? Réponse : il ne le peut pas.
La contagion en cours…
« Le ralentissement mondial se ressent désormais sur les marchés américains : on récolte ce que l’on a semé » : c’est l’avertissement que nous vous lançons depuis des mois. Nous avons déclaré régulièrement que la croissance américaine était trop faible pour supporter un relèvement des taux d’intérêt, et que les menaces continuelles de Janet Yellen concernant ce relèvement ne faisaient qu’amplifier cette faiblesse.
Résultat, le dollar s’est super-renforcé, les marchés émergents s’effondrent et, finalement, la contagion est de retour aux Etats-Unis.
Les indicateurs et alertes étaient visibles comme le nez au milieu de la figure.
Ce n’est pas la première fois qu’une crise des marchés émergents parvient jusqu’à nos côtes. La même dynamique était à l’oeuvre en 1997 et en 1998. La crise a débuté en Thaïlande en juin 1997 et s’est rapidement propagée aux pays voisins, l’Indonésie et la Malaisie :
- cela s’est d’abord manifesté sous forme d’effondrement des devises et des Bourses locales, de fuite des capitaux, et de faillites de nombreux entrepreneurs et investisseurs qui avaient emprunté en dollar et investi en monnaie locale, croyant à tort que ces devises locales étaient « arrimées » (reliées par un peg) au dollar. L’un après l’autre, ces pegs ont été rompus et les investisseurs ont tout perdu ;
- cette contagion s’est ensuite propagée à la Corée à l’automne 1997. Des émeutes ont éclaté en Corée et en Indonésie, et il y a eu des effusions de sang dans les rues : ce n’était pas ce sang « métaphorique » dont les analystes financiers parlent, mais bien de sang réel, alors que ces émeutiers « de l’argent » faisaient face aux soldats dans les rues ;
- enfin, une période de calme a suivi, début 1998. On avait l’impression que la panique avait été « contenue », mais ce n’était pas le cas. Des difficultés financières surgirent à nouveau en Russie en août 1998, aboutissant directement à l’effondrement du hedge fund Long Term Capital Management (LTCM). (Note de la rédaction : J’étais conseiller juridique de LTCM et j’ai négocié ce sauvetage, organisé par Wall Street et financé par la Fed, en septembre 1998) ;
- au paroxysme de la crise de LTCM, nous avons frôlé une fermeture totale des marchés mondiaux. Seul un renflouement de 4 milliards de dollars, à la dernière minute, ainsi que deux baisses de taux d’intérêt de la Fed ont pu sauver la mise. En octobre, la crise était terminée.
La contagion peut se dérouler sur des mois voire des années
Le fait est que l’échelle de temps propre à la contagion financière n’est pas limitée à des jours ou à des semaines. Ces crises peuvent se dérouler sur des mois voire des années. Ce qui ressemble à des événements distants et sans rapport peut véritablement constituer les indicateurs et alertes d’un événement à venir bien plus dangereux.
Nous assistons à nouveau à ce processus : ce qui a débuté comme un ralentissement en Chine s’est désormais propagé à presque tous les marchés émergents. Une fois de plus, les pegs de devises se rompent de la Chine jusqu’au Kazakhstan. Finalement, le marché américain est touché, à mesure que les investisseurs se débarrassent d’actifs risqués tels que les actions, et se ruent sur des actifs plus liquides, tels que des sicav monétaires, des obligations souveraines court terme et des dépôts bancaires.
Mais il existe deux différences majeures entre aujourd’hui et 1998
La première, c’est que les marchés sont reliés de façon beaucoup plus dense. Si en 1998 nous n’étions qu’à la mi-temps, en termes de mondialisation, à présent nous arrivons au bout du dernier quart-temps.
La seconde différence, c’est que la Fed n’a plus de marge pour abaisser les taux d’intérêt comme elle l’a fait en 1998. La Fed a commis une erreur en ne relevant pas les taux en 2010 et 2011 alors qu’elle avait la possibilité de le faire. A présent, les investisseurs doivent payer le prix de cette bourde historique.
Même dans les circonstances les plus terribles, il existe des façons d’en profiter, à condition de comprendre les forces dynamiques et d’éviter les conseils tendancieux de Wall Street.
L’effondrement des marchés émergents vient juste de commencer.
VOICI CE QUE VOUS DEVEZ SAVOIR…
Lorsque les bulles éclatent, elles ne le font pas en ligne droite.
Elles se brisent, remontent en flèche, se brisent à nouveau, remontent en flèche à nouveau et ensuite, elles vont au tapis. Le krach boursier de 1929 a mis quatre ans avant d’atteindre son plus bas, en 1933, à moins 80%.
Nous nous trouvons dans un processus similaire aujourd’hui. Les Bourses vont chuter, et ceux qui tiennent des discours optimistes diront : « Ne paniquez pas, restez. » D’autres diront : « Achetez dans les creux. » Alors le marché remontera et ils diront : « Vous voyez, je vous l’avais dit. » En quelque sorte, vous n’êtes pas censé remarquer que le rally n’est pas aussi fort que le creux et que vous perdez de l’argent tout le long, malgré ces discours optimistes.
N’écoutez pas ce genre de conseils…
Les marchés financiers ne s’appuient plus sur les fondamentaux depuis que l’assouplissement quantitatif QE2 a démarré en août 2010, après que Ben Bernanke l’ait « laissé échapper » dans son discours de Jackson Hole. Depuis, les marchés n’ont cessé de léviter avec l’argent facile de la Fed. Or, ce que te donne la Fed, la Fed te le reprendra.
Depuis décembre 2013, nous avons assisté au tapering (diminution du rythme des rachats d’actifs/des QE) et au retrait du forward guidance (anticipations visant à orienter les acteurs économiques). Janet Yellen a commencé à tenir un discours musclé concernant les taux. Les marchés émergents se sont effondrés, et la contagion est arrivée chez nous.
Voilà pourquoi les marchés ont cédé fin août.
Une seule chose compte, à présent
- La Fed va-t-elle réagir, ou non ?
- Le discours musclé concernant les taux va-t-il perdurer, ou bien la Fed va-t-elle lancer une nouvelle salve de paroles optimistes et de QE ?
Nous surveillons les indicateurs et alertes dans ce périmètre et nous vous tiendrons informé.
La Fed n’est pas à court de munitions. Elle pourrait :
- procéder à un QE4 ;
- faire tourner la planche à billets l’helicopter money ;
- instaurer des taux d’intérêt négatifs…
- ou intégrer la guerre des devises avec un dollar déprécié.
Nous attendons que la Fed réagisse et procède à un nouvel assouplissement monétaire.
Et en attendant, le massacre va continuer.
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