Dans mon dernier article, j’ai abordé les nombreuses incertitudes auxquelles sont confrontés les investisseurs.
Parmi les choses que l’on ne peut pas prédire avec certitude figurent la croissance économique, l’inflation, la valeur des devises, les prix des matières premières, les découvertes scientifiques, les avancées technologiques, les marchés haussiers et baissiers, les résultats des élections et les futures lois.
Et c’est sans compter les événements qui surviennent de nulle part : un attentat majeur, la faillite d’un hedge fund, une guerre dans le détroit de Taïwan, une catastrophe naturelle monumentale (comme le violent séisme qui a frappé la Californie), une cyber-attaque qui paralyse tout, ou quelque chose auquel on n’aurait jamais songé.
Pour toutes ces raisons, il semble logique de suivre dix étapes éprouvées afin de blinder votre portefeuille.
Dans mon précédent article, j’ai couvert les cinq premières mesures à prendre : épargner plus, bien répartir vos actifs, rééquilibrer votre portefeuille chaque année et éviter de vous laisser séduire par les prévisions de marché et le market timing.
Voici les cinq dernières étapes qui offriront un blindage en kevlar à votre bas de laine…
6. Réduisez vos coûts d’investissement
Dans la vie, on reçoit à hauteur de ce que l’on donne. Mais dans le monde de la gestion d’actifs, c’est très loin d’être le cas.
Tous les ans, 3 spécialistes de la gestion sur 4 ne parviennent pas à surperformer leurs indices de référence. Sur une période de dix ans – voire plus –, plus de 95% d’entre eux sous-performent.
Avez-vous vraiment envie de verser des honoraires importants à quelqu’un qui a moins d’une chance sur vingt d’avoir de bons résultats ?
Les frais d’investissement et les rendements sont inversement corrélés. Plus votre conseiller gagne d’argent, moins vous en gagnez.
C’est particulièrement vrai dans le domaine des rendements fixes. Imaginons que les bons du Trésor américain à 10 ans rapportent 3,3%. Si vous optez pour un fonds obligataire appliquant des frais de 1%, il avale près d’un tiers de votre rendement.
L’objectif est que VOUS deveniez riche – pas votre courtier ou votre conseiller financier.
7. Payez le moins d’impôts possible
Lorsque j’étais gestionnaire d’actifs, j’ai été surpris de constater à quel point les gens faisaient peu de cas des conséquences fiscales de leurs opérations d’investissement.
Réduire vos impôts est crucial, pour pouvoir atteindre vos objectifs financiers à long terme.
Comment faire ?
- Évitez les fonds communs de placement à gestion active
Non seulement la plupart d’entre eux sous-performent leurs indices de référence – cf. étape 6 – mais on vous versera régulièrement des gains financiers, même au cours des années moroses.
- Réduire le turnover
Warren Buffett remarque à juste titre que la fiscalité sur les gains financiers n’est pas une taxe sur les gains financiers, mais sur les transactions. Alors il en fait le moins possible, en insistant bien sur le fait que son délai de conservation préféré est « l’éternité ».
- Réalisez vos transactions à court terme sur un compte retraite approprié
Ainsi, vos gains bénéficient d’un report fiscal.
- Privilégiez des produits d’investissement qui vous évitent de payer chaque année des impôts sur les versements de dividende et d’intérêts.
- Hors de votre compte retraite, conservez les actions gagnantes au moins une année. Ainsi, vous bénéficierez d’un traitement fiscal plus avantageux sur vos gains financiers à long terme.
- À la fin de chaque année, compensez les gains financiers réalisés par les pertes constatées.
- Sur vos comptes imposables, privilégiez les actions, les fonds indiciels et les obligations municipales. Cela vous permet de contrôler vos impôts, ou d’en éviter.
(À noter que certains de ces conseils peuvent s’appliquer différemment en fonction du régime fiscal auquel vous êtes rattaché ou de votre lieu de résidence. Pour en savoir plus sur votre cas personnel, nous vous invitons à contacter un conseiller fiscal.)
8. Appliquez des critères d’achat et de vente stricts
Vous devriez tenir une liste de tous les titres que vous achetez, et adopter une discipline de fer pour tous ceux que vous vendez.
Par exemple, si vous investissez dans des valeurs de croissance, vous ne devriez pas placer un centime dans une action tant que vous n’avez pas identifié que ses produits sont compétitifs, que sa part de marché progresse, que son chiffre d’affaires et la croissance de ses bénéfices sont solides, qu’elle affiche un rendement sur fonds propres élevé et que ses marges sont bien protégées (par des brevets et des marques et modèles déposés, par exemple).
Si vous êtes un investisseur dit « value » [NDLR : qui investit dans des titres décotés par rapport à leurs fondamentaux], vous devriez privilégier un modèle économique durable, beaucoup de revenus récurrents, un faible ratio cours/bénéfices ou cours/valeur comptable, une grande marge de sécurité et un dividende durable assorti d’un taux raisonnable.
À quel moment vendre ? Seulement quand certaines conditions sont remplies. Dans mon Portefeuille de Trading Oxford, par exemple, nous appliquons un stop suiveur de 25%. Chaque fois qu’une action recule de 25% par rapport à son plus haut à la clôture – ou notre prix d’entrée initial –, nous vendons. Cela protège nos gains en période faste et préserve notre capital en période moins favorable.
9. Ayez des attentes réalistes
Avez-vous déjà croisé quelqu’un qui suit à fond un nouveau régime alimentaire et un programme de fitness ? Il vous dira qu’il a renoncé aux pâtes, au pain et à d’autres glucides, qu’il ne boit de l’alcool que le week-end. (Et juste un verre de vin au dîner.) Qu’il va à la salle de sport cinq fois par semaine. Et ainsi de suite.
Que se passe-t-il ? Un mois plus tard, il vous avoue qu’il a renoncé. Que c’était trop dur.
Mais le véritable problème, c’est que ses attentes étaient trop élevées.
Vous voulez perdre 10 kg en un an ? Oubliez les miracles. Perdez 28 grammes par jour. 28 grammes sur 365 jours, cela représente 10 kg, environ.
C’est réaliste car la glace figure toujours au menu. (Mais pas le cornet enrobé de chocolat.)
C’est également vrai dans le domaine de l’investissement. Appliquez des principes éprouvés qui fonctionnent jour après jour et le petit monticule se transformera en montagne.
Tout ce qu’il vous faut, c’est du temps.
10. Reconnaissez l’ennemi qui est en vous
Mon collègue Bill Bonner, qui a fondé Agora, dit souvent ceci : « Les investisseurs n’obtiennent pas ce qu’ils veulent mais ce qu’ils méritent. »
Cette remarque incisive englobe tout ce que j’ai dit dans ces deux derniers articles.
Ceux qui investissent dans le marché actions doivent acheter à la baisse et vendre à la hausse. Mais comment le faire si vous ne vous intéressez aux actions que lorsque le marché haussier est déjà bien avancé, et que les niveaux de valorisation et de complaisance sont élevés. Ou bien si vous vendez sous l’emprise de la panique à chaque correction ou marché baissier ?
Il est difficile de contrôler ses émotions lorsque l’épargne d’une vie est en jeu. Il est humain de ressentir de l’exaltation, de l’espoir, de la crainte ou de l’avidité.
Mais il n’est pas avisé d’agir sur votre portefeuille d’investissement sous l’emprise de l’émotion.
Les investisseurs qui réussissent ont un plan. Et ils s’y tiennent. En matière d’investissement, la réussite n’est pas réservée à ceux qui ont le meilleur cerveau mais à ceux qui ont les nerfs les plus solides.
Personne ne sait avec certitude ce que réserve l’avenir. Mais l’histoire montre que si vous suivez ces dix principes éprouvés, votre portefeuille pourra résister à tous les tirs que vous essuierez.
Je vous souhaite de bons investissements,
Alex