Mes deux derniers amis se trouvent au début de leur apprentissage. Par ailleurs, ils n’avaient jamais levé de fonds pour des entreprises auparavant.
Dans ce cas de figure, le secret consiste à privilégier un investissement très simple. Le problème de mes amis, c’est qu’ils ne savent même pas ce que j’entends par « simple », car c’est quelque chose qu’ils n’ont encore jamais fait.
UN INVESTISSEMENT SIMPLE correspond à une proposition comme celle-ci : « Je vous offre un million de dollars ; en échange, je détiendrai 33% de votre société. »
Cela veut dire que si la valeur de l’entreprise était de 2 millions de dollars avant l’investissement, elle s’élève à présent à 3 millions de dollars grâce au million de dollars supplémentaire reçu.
Ainsi, la personne qui a investi un million de dollars possède 33 % de l’entreprise, soit un tiers de sa valeur — 1 million (l’investissement) divisé par 3 millions (la valeur de l’entreprise après l’investissement).
Si une personne fait une proposition d’investissement COMPLEXE, c’est une très mauvaise affaire.
Par exemple : « Je propose d’investir un million de dollars dans votre société. Si vous n’avez pas atteint certains objectifs précis dans six mois, je détiendrai alors 80% de l’entreprise ; dans le cas contraire, j’en détiendrai 20%. Par ailleurs, je toucherai cinq centimes sur chaque produit vendu. »
C’est un accord stupide et compliqué ; même si vous avez désespérément besoin de lever des fonds, vous devez refuser ce type de proposition.
Mais comment faire pour négocier un investissement SIMPLE ?
Élaborez un business plan expliquant :
- EN QUOI VOUS ÊTES UNIQUE ;
- EN QUOI VOTRE ENTREPRISE EST UNIQUE ;
- EN QUOI CE QUE VOUS VENDEZ EST UTILE AUX GENS ;
- LES CARACTÉRISTIQUES SPÉCIFIQUES du service (soyez suffisamment précis pour que la description tienne sur une ligne) ;
- QUEL EST LE DEGRÉ D’URGENCE : pourquoi lever des fonds maintenant ?
Mon amie avait une excellente idée d’entreprise. J’ai même commencé à réfléchir à d’autres sources de revenus qu’elle pourrait facilement tirer de son business model.
Mais elle m’a dit que l’investisseur était uniquement intéressé par le « produit minimum viable » (MVP, minimum viable product). Cela voulait dire qu’il avait lu un livre d’investissement, mais qu’il n’était pas aussi expérimenté que cela.
J’ai donc conseillé à mon amie d’inclure le MVP dans ses prévisions de chiffre d’affaires pour la première année (il avait demandé des prévisions), et de commencer à ajouter les autres sources de revenus aux années suivantes.
En d’autres termes, cela permet à l’investisseur de voir que s’il n’investit pas maintenant, il passera à côté d’une bonne opportunité quand elle commencera à ajouter d’autres sources de revenus.
J’ai choisi de présenter cet exemple en premier parce qu’il n’est pas si extraordinaire, mais qu’il s’agit d’une situation que rencontrent couramment les entrepreneurs novices.
Certains des autres conseils que je lui ai donnés sont décrits plus en détail dans les exemples suivants.
L’ACHAT D’UNE MAISON
L’un de mes amis vit dans une maison. Il y a quelques années, il a conclu un accord de location-accession : le loyer payé devait servir d’acompte en vue de l’achat du bien.
Néanmoins, cet accord n’a jamais été appliqué et la location est tout simplement devenue… une location.
À présent, il veut acheter cette maison. Nous avons donc examiné en détail ce qu’il devrait faire, puis envoyé des e-mails.
Je vais résumer ces échanges.
Au départ, c’est la phase de pré-négociation. Robert Cialdini appelle cette étape la « pré-suasion ». Par exemple, si vous demandez à quelqu’un de faire un don à une association tandis que vous vous trouvez devant un magasin de fleurs, cette personne sera plus susceptible d’accepter.
Travaillez en amont pour essayer de faire tourner la chance un tout petit peu en votre faveur pendant la négociation.
Quand je dis « en votre faveur », ce n’est pas tout à fait exact. On dit généralement qu’une bonne négociation permet à chacun d’y trouver son compte.
On peut espérer que ce soit toujours le cas. Mais les choses ne peuvent pas toujours être parfaitement équitables. En fait, une bonne négociation doit donner à chacun L’IMPRESSION d’être gagnant dans l’affaire.
Le travail de pré-négociation permet de préparer le terrain pour donner aux deux parties le sentiment de sortir gagnantes de la négociation.
Dans le cas de l’achat d’une maison, le travail de pré-négociation commence avec les bases suivantes :
- Trouvez toutes transactions comparables concernant des maisons similaires situées dans le même secteur. Identifiez les transactions qui jouent en votre faveur et déterminez POURQUOI. Ensuite, identifiez les transactions qui ne jouent pas en votre faveur et déterminez également POURQUOI. Examinez les transactions qui ne jouent pas en votre faveur (celles qui se sont conclues à un prix bien supérieur à celui que vous seriez prêt à dépenser pour une maison de taille semblable située dans le même quartier) et déterminez pourquoi le prix était plus élevé (la maison a été rénovée récemment, le vendeur ou l’acheteur étaient très motivés, etc.).
- Identifiez tous les travaux qu’il est nécessaire d’effectuer dans la maison. Puisque mon ami est locataire de la maison qu’il souhaite acheter, il est en mesure de calculer précisément le montant exact des travaux requis. À présent, la négociation peut DÉBUTER !
Le vendeur peut commencer par affirmer : « Nous vendons la maison pour 500 000 dollars, pas un centime de moins. »
Bien sûr, « pas un centime de moins » ne veut rien dire, car c’est une négociation. À la fin, le vendeur doit avoir le sentiment d’avoir reçu environ 500 000 dollars de votre part, mais peut-être pas entièrement sous forme monétaire.
Cet aspect des choses est un peu plus complexe et j’ai ressenti le besoin d’être un peu plus nuancé dans mes recommandations.
Mes conseils fonctionneront-ils ? Je n’en sais rien. Ces négociations sont toutes en cours. Toutefois, je NE MENTIONNERAIS PAS ces conseils s’ils n’avaient pas déjà porté leurs fruits des dizaines voire des centaines de fois.
Mais tout d’abord, laissez-moi ouvrir une petite parenthèse.
Une négociation n’est pas une question d’argent.
Cela n’a rien à voir avec le fait de remporter une victoire.
Cela n’a rien à voir avec le fait de posséder ou de vendre quelque chose.
Une négociation est une question de mots et d’images.
Tout l’enjeu est de se faire entendre.
Une négociation consiste à transférer, à l’aide de mots, une image qui se trouve dans votre tête dans celle de votre interlocuteur, et de faire en sorte que chacun d’entre vous soit d’accord pour faire de cette image une réalité.
Il existe plusieurs techniques pour y parvenir ; voici celles que j’ai conseillées à mon ami. Ces « règles » peuvent également être utilisées par l’amie dont je parlais tout à l’heure, qui souhaite trouver des investisseurs pour son entreprise, ainsi que par mon ami qui s’apprête potentiellement à vendre une entreprise pour plusieurs milliards de dollars.
C’est la raison pour laquelle j’affirme que ce n’est pas l’argent qui compte, ni ce que vous vendez ou l’ampleur de la négociation.
Nous sommes tous des êtres humains dotés d’une cervelle, qui veulent simplement être aimés, acceptés et entendus.
Alors, écoutez bien.
A) LA TECHNIQUE « JE SUIS D’ACCORD… ET »
« JE SUIS D’ACCORD avec vous concernant le fait que la maison vaut 500 000 dollars, ET j’ajouterais qu’environ 100 000 dollars de travaux sont nécessaires. Par ailleurs, nous avions initialement convenu que le loyer versé au cours de la première année servirait d’acompte en vue de l’achat de la maison. Que diriez-vous de considérer que cela s’équilibre et de nous mettre d’accord sur la somme de 400 000 dollars ? »
Plusieurs techniques entrent en jeu ici.
« JE SUIS D’ACCORD » permet de montrer à l’interlocuteur qu’il a été entendu. C’est un instinct primaire. Nous voulons tous être entendus. C’est ainsi que nous déterminons notre statut au sein de la tribu. Après tout, nous sommes des primates tribaux depuis trois millions d’années.
Le fait d’être entendu signifie que nous sommes plus près du statut de dominant que de celui de dominé, que personne n’écoute.
Notre cerveau émet des hormones et des neurotransmetteurs de bonheur quand ce besoin de reconnaissance est satisfait.
« ET » annule tout ce qui a été dit précédemment. Votre interlocuteur continue de se sentir entendu, ce qui le rend heureux, mais il écoutera toute demande formulée après le « ET ».
Cela permet également de poursuivre la conversation pour éviter de livrer bataille. C’est l’équivalent de la technique du « oui, et » qui est la règle numéro 1 en improvisation.
Dans ce cas, l’interlocuteur acceptera (ou envisagera sérieusement) le fait que 100 000 dollars de travaux sont nécessaires.
C’est peut-être quelque chose qu’il voudra contester. Mais vous écartez ce risque en semant la confusion — dans cet exemple, en rappelant qu’un accord avait été conclu (mais jamais appliqué), prévoyant que le loyer versé au cours de la première année devait servir d’acompte.
Si le vendeur continue de discuter le montant des travaux estimés par mon ami, il est possible d’utiliser la technique suivante.
B) PUISQUE
Le mot « PUISQUE » est un terme très utile dans une négociation. Dans notre cas, nous pouvons par exemple l’employer ainsi : « Puisque je vis ici depuis cinq ans, il est certain que j’aime cette maison et que j’ai une bonne idée de ce qu’il faut faire pour la garder en parfait état. »
Cela vous permet de sortir du lot (« l’effet d’ambiguïté » est le biais cognitif qui entre en jeu ici) et d’alimenter la conversation.
C) CE QUI SIGNIFIE
« Ce qui signifie qu’à mon sens, 400 000 dollars est un prix raisonnable. »
« Ce qui signifie » permet de transférer l’image qui se trouve dans votre tête dans celle de votre interlocuteur. Ce qui a été dit avant « ce qui signifie » n’a presque aucune importance (quoique, dans ce cas précis, le fait de combiner l’ensemble des techniques rende la négociation encore plus efficace).
Une fois que l’interlocuteur perçoit cette image, qui a été amenée naturellement dans la conversation, il est beaucoup plus facile pour lui de considérer ce prix comme réaliste et de l’accepter.
D) CAR
J’ai déjà écrit à ce sujet par le passé, mais des études intéressantes ont été menées sur l’utilisation du mot « car ».
Dire « Achète mon livre » n’a pas le même effet que dire « Achète mon livre, car tu apprendras beaucoup de choses ». De nombreuses études ont démontré que la deuxième phrase permettait de vendre beaucoup plus de livres.
Fait intéressant : ce n’est pas l’information donnée (« tu apprendras beaucoup de choses ») qui favorise les ventes, mais uniquement l’emploi du mot « car ».
Une étude a démontré que dire simplement : « Achète mon livre, car tu devrais l’acheter » permettait de VENDRE AUTANT DE LIVRES que la phrase « Achète mon livre, car tu apprendras beaucoup de choses ».
Le mot « car » en lui-même est donc ce qui fait la force de la phrase.
Après avoir utilisé la technique « ce qui signifie », vous pouvez dire : « Ce qui signifie qu’à mon sens, 400 000 dollars est un prix raisonnable, car [tout ce que vous voulez ; par exemple, « c’est le prix du marché »]. »
E) LA TECHNIQUE DU CONSEIL
Enfin, je vais vous présenter ma technique favorite.
Au bout d’un moment, si vous avez l’impression que la négociation ne va pas tarder à aboutir, mais que la situation reste bloquée, demandez conseil à votre interlocuteur : « Écoutez, j’adore cette maison, mais je manque de recul. Je sais que vous aimeriez la vendre et je veux vous aider, mais J’AI BESOIN DE VOTRE AVIS : si vous étiez à ma place, que feriez-vous ? »
Personne ne veut donner de mauvais conseils. Et une fois que votre interlocuteur s’apprête à formuler un conseil ne serait-ce qu’à moitié pertinent, son esprit commence à lui souffler : « Tu es le genre de personnes qui va aider cet acheteur. »
Il sera alors beaucoup plus enclin à accepter une offre plus favorable pour vous. Cette technique marche À CHAQUE FOIS et permet à chacun d’y trouver son compte (la maison est vendue et vous payez un prix proche de votre prix idéal).
Oh ! Laissez-moi vous parler d’un dernier stratagème intéressant.
C’est une technique de pré-suasion appelée « l’effet d’ancrage ».
Au début de la conversation, faites référence à quelque chose qui n’a a priori rien à voir avec l’achat de la maison. Par exemple, vous pouvez dire « Dans le comté voisin, on peut acheter un mobile home pour 50 000 dollars. Je devrais probablement en acquérir un ! », puis éclater de rire pour souligner le ridicule de la situation.
Cette technique permet d’ANCRER la somme de 50 000 dollars dans l’esprit de votre interlocuteur, alors que vous ne parliez pas du tout de la maison en question.
Voici un autre exemple : « J’ai reçu d’excellentes nouvelles. Les frais de scolarité de mon fils ont BAISSÉ cette année. » Cela n’a rien à voir avec les prix de l’immobilier, mais cela permet d’ancrer dans la tête de votre interlocuteur l’idée que les prix DIMINUENT.
Des tonnes d’études indiquent que même des points d’ancrage éloignés de l’objet réel de la négociation (comme les exemples précédents) peuvent avoir une forte incidence sur l’issue de celle-ci.
Bien sûr, le processus de négociation est en cours. Ce sont simplement les conseils que j’ai donnés à mon ami HIER. Je vous tiendrai au courant de l’évolution de la situation. Tout ce que je peux affirmer, c’est que ce sont des techniques qui ont fonctionné pour moi par le passé, et qui ont également toutes porté leurs fruits avec d’autres personnes.
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Je suis un vendeur et Je m’intéresse à tout ce qui concerne la vente