Sergey Brin et Larry Page, les fondateurs de Google, se préparaient à leur introduction en Bourse. Ils avaient accepté 25 millions de dollars de la part de sociétés de capital-risque.
Ces dernières voulaient que Sergey et Larry recrutent un PDG.
Alors ils ont commencé leurs recherches.
Pour faire office d’entretiens, ils ont emmené les candidats au Burning Man. Il s’agit d’un festival artistique qui se tient le désert de Black Rock, au Nevada, où l’on danse nu, où l’on fait des expériences hallucinatoires et où l’économie est fondée sur le troc.
C’était leur façon de les tester.
Et bon nombre de candidats susceptibles de décrocher le poste de PDG ont échoué. J’aurais probablement été déshydraté en moins de deux et j’aurais sûrement vomi.
Mais Eric Schmidt a réussi ce test.
Il a participé à mon podcast lors duquel je lui ai demandé : « Pourquoi les candidats échouaient-ils ? Qu’est-ce qui n’allait pas ? »
« Leurs opinions n’étaient pas compatibles », répondit-il.
« Attendez. Vous ne pouvez pas vous contenter de cette réponse. »
Le public se mit à rire. J’avais besoin de réponses ! C’était l’ancien PDG de Google. Puis il a occupé le poste de PDG au sein d’Alphabet Inc., la société mère de Google, de 2011 à 2017.
« Mieux vaut ne pas donner de noms.
— Je ne lâcherai pas le morceau. Donnez-moi un exemple.
— Disons qu’ils n’avaient pas la même culture technologique. Et il fallait une personne qui soit capable de fonctionner comme Sergey et Larry, ce qui est en grande partie technique. »
Je ne sais pas ce qu’il voulait dire par là.
Mais Eric a réussi le test du Burning Man. Puis il a reçu un appel de John Doerr, le gars qui a d’abord recruté Eric chez Google. Il lâche une bombe :
« Vous avez besoin d’un coach. »
Eric n’était pas d’accord. Il s’est dit : « Je dois faire mes preuves ! »
Faux. C’est de l’ego.
Larry et Sergey ne voulaient pas seulement qu’Eric réussisse. Ils voulaient que Google fonctionne bien.
Éric allait rapidement le comprendre. Voici comment s’est déroulée la conversation :
John : « Les joueurs de tennis ont-ils des coachs ?
Eric : « Oui, bien sûr, mais les coachs ne sont pas aussi bons que les joueurs. »
John : « C’est le but. Un entraîneur fait les choses différemment. »
Puis il a compris.
Eric a laissé de côté son arrogance (« Je n’ai pas besoin de coach, regarde tout ce que j’ai fait, regarde comme je suis bon, on vient de m’engager comme PDG »).
Il a dit : « Beaucoup de gens ne comprennent pas. Parce que tout le monde veut un mentor. Vous voulez que quelqu’un à qui vous plaindre et qui vous soutienne. Nous avons besoin de ça. Un coach, ce n’est pas ça. Un coach, c’est quelqu’un qui aide l’équipe à gagner. »
Il a cité John Wooden, le célèbre entraîneur de basketball de l’UCLA : « Ce qui compte, c’est ce qu’on apprend quand on croit tout savoir. »
Puis il a rencontré Bill Campbell, le « coach au milliard de dollars ».
Bill a contribué à la réussite de plusieurs personnes et, si vous faites le bilan, cela équivaut à des milliards de dollars. Il a coaché Steve Jobs, Jeff Bezos, Larry Page, Sergey Brin…
La liste est longue.
La question qui se pose alors est la suivante : COMMENT puis-je avoir accès à un Bill Campbell ?
Il est décédé en 2016. Et, aux dires d’Eric, il n’y a plus personne comme lui.
C’est ainsi qu’Eric et ses collègues, Alan Eagle et Jonathan Rosenberg, ont écrit le livre Trillion Dollar Coach: The Leadership Playbook of Silicon Valley’s Bill Campbell.
« Il n’aurait jamais approuvé ce livre », a dit Eric.
Mais c’était nécessaire. Parce qu’il permet à des gens qui ne sont pas liés au monde de Google ou d’Apple d’avoir accès à un coach de classe internationale.
Voici six leçons qu’Eric Schmidt transmet aujourd’hui grâce au coach au milliard de dollars.
1. QUITTER LA SCÈNE
Bill Campbell avait une vaste expérience :
- il avait été vice-président du marketing chez Apple ;
- président de l’université de Columbia ;
- président-directeur général d’Intuit.
Il aurait pu prendre sa retraite. Et passer le reste de sa vie à profiter des fruits de son travail.
Mais ce n’est pas ce qu’il a fait.
Au lieu de cela, il a créé quelque chose de nouveau. Il est devenu « le coach au milliard de dollars ».
Comme le dit si bien Eric : « Il y a un âge où il est temps pour toi de quitter la scène. Et, dans le cas de Bill, il a décidé de laisser sa place et d’aider les autres sans recevoir aucune compensation. La vie l’avait tellement gâté. Il voulait donner en retour au secteur et aux gens qu’il aimait. »
2. DONNER EN RETOUR
Lorsque John Johnson a quitté son poste de PDG chez JCPenny, Bill lui a dit : « Si tu as été béni du Ciel, donne en retour. »
3. NE PAS COACHER LA PERSONNE. COACHER L’ÉQUIPE
Au début, Éric ne voulait pas de coach. Parce qu’il ne pensait qu’à lui.
« Regardez tout ce que j’ai fait, regardez comme je suis bon », disait-il.
« En quelque sorte, je disais ça d’une façon assez arrogante… peut-être super arrogante. »
Mais Bill a appris aux gens à prendre du recul. « Son but était de garder l’équipe soudée, m’a dit Éric. Comme un entraîneur de football. »
4. NE JAMAIS CRIER
Bill ne criait jamais. Il ne vous rabaissait jamais. Il ne vous mettait jamais dans l’embarras.
Trop de gens souffrent lorsqu’ils sont confrontés à ce genre de patron.
J’ai demandé à Eric : « Au cours de 18 années que vous avez passées chez Google, vous est-il déjà arrivé de crier sur quelqu’un et de vous dire ensuite : ‘Bill n’aurait pas aimé ça, mais je devais le faire’ ?
— J’ai commis cette erreur et bien d’autres encore », a répondu Éric.
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Mais il a appris en observant Bill.
« Il vaut mieux poser des questions plutôt que de dire aux gens ce qu’ils doivent faire, a poursuivi Eric. Parce que si vous posez une question à une personne, elle s’engage dans votre processus de pensée. Elle va essayer de comprendre pourquoi vous avez posé cette question et va modifier son comportement. Si vous criez après un employé afin qu’il fasse quelque chose, vous êtes le perdant. »
5. L’AMOUR AU TRAVAIL NE POSE AUCUN PROBLÈME
Bill Campbell n’est plus de ce monde.
Les histoires que vous trouvez dans le livre Trillion Dollar Coach proviennent donc d’un florilège d’entretiens.
Et dans chaque entretien revenait le même thème : l’amour.
Jonathan Rosenberg, co-auteur du livre, a dit : « Le mot amour est probablement le mot que nous avons le plus souvent entendu lors de nos entretiens. Tout le monde adorait Bill. Tout le monde l’aimait. Et on a appris qu’il n’y a rien de mal à amener l’amour sur le lieu de travail. Et, bien sûr, c’est un amour tout à fait approprié, mais c’est un mot que vous n’avez jamais entendu ici, dans la Silicon Valley, ou sur le lieu de travail. Bill s’intéressait vraiment à son prochain. Et je pense qu’il nous a appris à tous que pour être un meilleur manager et un meilleur leader, il faut vraiment aimer les gens. »
Eric a donné un exemple : « Bill n’entamait jamais une conversation avec quelqu’un au travail sans lui poser une question plus personnelle. »
Comme par exemple : « Comment vont tes enfants ? » Une question qui n’avait rien à voir avec le travail.
De cette façon, les gens savaient qu’il s’intéressait à eux.
6. SE DONNER LES MOYENS D’ÊTRE COACHÉ
Jonathan Rosenberg a raconté comment il avait rencontré Bill.
Un jour, Bill s’est dirigé vers lui et est allé droit au but : « Je sais que vous êtes intelligent. Je m’en fous. J’ai une question. »
Jonathan n’avait aucune idée de ce qui se passait. Il était dans une salle de conférence. Il attendait Eric. Et ce vieux type arrive. Il le cuisine. Et lâche cette question : « Pouvez-vous être coaché ? »
Jonathan se croit intelligent. Alors il répond : « Cela dépend de la qualité du coach. »
Bill quitte la salle en disant : « Les petits malins ne peuvent pas être coachés. »
Puis Jonathan réalise que c’est le coach dont tout le monde parle ! Le type qui a entraîné Steve Jobs !
Il sort de la pièce pour essayer de rattraper le coup. Et avoir une chance d’être coaché.
Bill lui dit : « Fais demi-tour. Retourne à l’intérieur. Pose ton cul sur la chaise. »
C’est bizarre parce que Jonathan avait la quarantaine.
Jonathan explique : « J’étais comme Éric. Je ne voulais pas de coach. Je n’en avais pas besoin. »
Bill avait été confronté à cette attitude des milliers de fois. Et à chaque fois, il s’accrochait à la même vérité : « Ce qui compte, c’est ce qu’on apprend quand on croit tout savoir. »
J’ai le privilège de pouvoir rencontrer des gens comme Eric Schmidt, mais aussi Howard Marks, investisseur milliardaire, ou Roger McNamee, mentor des grands patrons de la tech… Retrouvez ces entretiens dans mon service Top 1% Altucher, dans lequel je partage avec vous toutes les stratégies des professionnels de Wall Street.