J’ai failli ruiner ma carrière avant même qu’elle ne commence.
En 1992, HBO m’a proposé un poste. Si seulement j’avais accepté. Ils voulaient que je travaille sur un nouveau domaine, la « réalité virtuelle ».
Je ne leur ai jamais répondu, je ne me sentais pas à ma place.
Comment cela se fait-il ?
Je ne voulais pas avoir un boulot dans « le vrai monde » avant d’être certain d’être apprécié.
J’avais si peu d’amour-propre que je pensais que la seule manière pour que les gens chez HBO m’apprécient était de publier un roman. J’ai donc écrit, écrit, écrit.
J’ai écrit un roman appelé Le Livre d’Orphée (un titre cliché et sentimental, écrit par un jeune homme de 24 ans). Il s’agissait d’un roman de 400 pages à propos de la personne que je voulais être dans mes rêves les plus fous au lieu d’un roman à propos du véritable moi.
Après plus de quarante refus d’éditeurs – pour un livre qui m’avait pris plus d’un an à écrire – j’ai écrit un autre roman.
(Quelques livres que j’ai publiés depuis. Des millions d’exemplaires vendus. La persévérance est plus forte que la résistance.)
Le titre était Le Livre de David (je sais). C’était au sujet du David de la Bible mais d’un point de vue très alternatif. Là encore, une quarantaine de refus.
J’ai écrit un autre roman : La Prostituée, le romancier porno, le romancier de gare et leurs amants (d’après le film Le Cuisinier, le voleur, sa femme et son amant).
Une quarantaine de refus.
J’ai écrit entre 40 et 50 histoires courtes. Des milliers de refus.
J’ai écrit des nouvelles. J’ai lu des milliers de livres puis leurs critiques parce que je voulais faire mieux.
J’avais très peur de me présenter au monde les mains vides. Personne ne m’aimerait. Personne ne penserait que j’étais quelqu’un de spécial.
J’avais une si mauvaise estime de moi-même que si les gens ne pensaient pas que j’étais spécial (les gens qui chuchoteraient derrière mon dos : « Qui est-ce ? », « Lui ? Il a écrit un roman ! »), ils me détesteraient ou pire, ne me remarqueraient pas.
Les femmes me mépriseraient. Tout le monde se moquerait de mes idées. Finalement, en 1994, j’avais peur de deux choses.
Mes amis commençaient à gagner plus d’argent que moi (un péché !). Et je voulais rompre avec ma petite amie de l’époque.
J’étais si mauvais dans les conversations difficiles que j’ai décidé que la seule manière de la quitter était de déménager à New York.
J’ai donc accepté le poste chez HBO même si, malgré des milliers et des milliers de pages écrites, je n’en avais jamais publié une seule.
Cela n’a pas été facile de leur rappeler qui j’étais mais j’y suis parvenu. C’était difficile d’obtenir ce job en 1994 mais quelques mois plus tard, j’étais à NY pour mon premier jour, vêtu de mon costume cravate et installé dans mon box dans le building HBO.
Les trois premiers mois, j’ai tellement merdé qu’ils durent m’envoyer à des cours de rattrapage en informatique malgré le fait que je m’étais spécialisé dans l’informatique et avais obtenu un diplôme dans ce domaine.
J’étais le pire employé. Chaque jour j’étais certain d’être viré.
Accepter ce boulot fut la meilleure décision de ma vie.
Les frères Wright possédaient un petit atelier de bicyclettes. Les gens adorent faire de la bicyclette.
L’État américain consacrait 2 millions de dollars pour tenter de faire voler un avion.
Les frères Wright (depuis leur minuscule atelier) faisaient la course contre le riche gouvernement américain.
Qui parviendrait à voler le premier ?
Le gouvernement américain était convaincu qu’un avion devait voler selon une trajectoire totalement rectiligne sinon il s’écraserait. Aucune turbulence. ZÉRO imperfection, sinon il tomberait.
Les frères Wright croyaient aussi cela.
Jusqu’à ce qu’un jour… ils observent un enfant apprendre à faire du vélo. L’enfant grimpa sur le vélo, démarra, vacilla pendant quelques secondes et à chaque tournant, il vacillait encore mais rapidement il prit de l’assurance et s’en alla. Il savait faire du vélo.
Il vacillait !
Ils conçurent un avion qui vacillait. L’avion vola. Ils étaient entrés dans l’Histoire.
Ils avaient battu l’État américain qui dépensait des millions. Ils y étaient parvenus en se concentrant sur les progrès plutôt que sur la perfection.
J’ai beaucoup d’imperfections. Parfois je suis paresseux, parfois je procrastine, parfois j’ai peur d’affronter les gens et je disparais alors de leur vue.
J’essaie d’être bon ami et bon père mais c’est difficile. J’essaie d’être un bon associé mais j’ai des insécurités et des doutes.
J’essaie d’avoir de bonnes idées mais c’est un effort constant d’exercer mon muscle à idées.
Je vacille.
Puis, parfois, je vole.
Chez HBO, j’ai arrêté d’écrire. J’ai commencé à concentrer tous mes efforts sur cette chose nouvelle, le « World Wide Web » (« W W W »).
J’ai créé des sites web imparfaits (laids, lents, fonctionnant mal). Mais personne d’autre ne faisait de sites web.
J’avais des idées sur le design mais je n’étais pas designer. Mes programmes n’étaient pas soignés mais ils répondaient au cahier des charges.
(Le site web que j’ai créé pour http://HBO.com en 1996)
À force de construire des sites web, rapidement d’autres entreprises me contactèrent (AmericanExpress.com, TimeWarner.com, etc. etc.).
J’ai fondé mon entreprise. J’ai quitté HBO. J’étais nullissime en tant que commercial, je n’étais pas bon pour assurer le suivi, j’étais mauvais dans le service après-vente.
Je n’y connaissais rien en affaires.
Mais à l’époque, rares étaient ceux qui savaient faire des sites web. Malgré mes sites laids et imparfaits, les clients affluaient donc.
J’ai vendu mon entreprise pour en lancer une autre. Ce fut un échec. J’en lançais une autre. Encore un échec. J’en lançais une autre. Autre échec.
C’était il y a bien longtemps. Parfois j’abandonnais mais j’avais des enfants à nourrir.
J’ai vraiment gâché beaucoup de choses. Mais je voulais survivre, m’améliorer, je n’avais pas d’objectif. Juste survivre, juste m’améliorer.
J’ai vacillé. Mais j’ai volé.
Si je ne m’étais accroché qu’à mes Objectifs, je ne me serais jamais lancé dans ma Vie.
Progressez, pratiquez, persévérez, donnez-vous du mal puis trouvez les plaisirs de la vie.
N’ayez pas peur de vaciller.